Jeu 30 Juin - 14:51 | | YOU CAN'T MAKE ME DISAPPEAR I’m the poison in your bones Elle l'aime. L'aveu se déploie dans son abdomen, file à une allure folle dans ses veines. Elle l'aime. L'aveu cabriole, se jette dans l'atmosphère et se propage dans son organisme comme un cheval lâché aux quatre vents. Diane sourit derrière l'iode qui caresse ses joues creuses. Elle sourit de cette sérénité latente dont la fougue l'ébranle jusqu'à la moelle. Elle l'aime. Et cette certitude déconcertante l'étourdie au-delà de l'alcool qui s'évapore en une promesse lointaine. Ses lèvres sont humides de ces larmes sincères que l'on ne peut dissimuler à la face du Monde. Elle l'aime. Et ça se répète dans son crâne, telle une mélopée funèbre qui n'annoncerait plus de lendemain à venir. Diane se raccroche aux épaules de la rousse pour ne pas chuter sous ce flot imposant. Mais le sol se dérobe incontestablement sous ses pas. Sa non-vie lui échappe. C'est une mort partielle, celle qu'elle prie à chaque seconde de son existence. C'est un abandon délibéré; sans fioritures, ni apparats. Son âme se laisse enfin tomber. Et son corps, lui-même, semble abdiquer. Elle l'aime. C'est démesuré, incontrôlable et insensé. Mais elle se gorge de ce sentiment, elle lé chérit dans ses baisers agités qui, lentement, ne sont plus qu'une caresse docile. Elle l'aime. C'est ridicule. Et cela ne signifie rien à travers leur capharnaüm réciproque. Pourtant, c'est malgré elle, et ça la dévore de bas en haut, comme une bourrasque indomptable qui prendrait la peau sans ménagement. Alors, elle se love contre elle, désespérément: assoiffée.
Le Ciel perle au dessus d'elles. Il pleure ces deux mendiantes qui ne savent que s'harponner l'une l'autre. Il pleure cette tendresse oubliée, cette tendresse qui les noie sous quelques frissons clandestins. Il pleure la violence qui se mue pudiquement en douceur illusoire. Il pleure cette pureté presque candide qui se joue sous son regard empathique. Diane se perd. Le froid mord son épiderme. Mais il y a cette chaleur persistante, ces braises qu'elle croyait essoufflés et qui crépitent timidement entre ses côtes. Elle vit. Elle le sent. Et ça bat partout en elle, comme une vieille pendue fatiguée qui reprendrait enfin son souffle. Elle vit. Et elle rit doucement sous la pluie, d'un rire délicieux et enfantin. Le noir étend ses ailes implacables, mais ce n'est plus cette obscurité qui l'accable. C'est une étreinte salvatrice, qui l'abrite et qui la berce. Diane s'émerveille face à cette égide à la fois sépulcrale et maternelle au dessus de sa couche. Elle tend sa main, fébrile, pour y glisser ses doigts. Et elle en effleure le plumage dans un geste lascif, le cœur serré et la respiration quasi-inexistante. Ses phalanges en suivent le dôme dessiné autour d'elle. L'eau ne s'épanche plus sur son visage, elle brille simplement au sein de ses prunelles claires. - Mon ange..., murmure-t-elle.
Prudemment, elle abaisse son aile. Son regard ne lâche pas le sien. Il y a cette connexion saisissante entre elles, ce lien indéfectible qu'elles ne pourront plus jamais fuir. Diane se blottit contre cette membrane étendue. Elle laisse l'averse lui tremper les os. Elle se pelotonne simplement, comme un chaton qui chercherait un peu de chaleur dans le froid. Elle y dépose sa joue, les doigts délicatement écartelés près de son visage. Et elle ferme les paupières, l'esprit volatile et l'âme apaisée. Elle s'égare dans quelques couleurs éclatantes, dans quelques émois fantasques. Mais elle aime. Et cela suffit à taire l'angoisse du lendemain. Ses lèvres parsèment l'ébène. Elle s'imprègne de son essence, y insuffle la sienne. Il y a une harmonie doucereuse, une union tacite qui ne sera jamais dévoilée. Spéciale. Elle n'est pas certaine d'en comprendre véritablement le sens. Mais, cela lui suffit en cet instant. Et elle s'en repaît.
Au dessus d'elles, le Ciel se disloque. Il y a le deuil de ces deux silhouettes qui, précédemment, se sont élancées dans le vide et qui, finalement, ne seront plus jamais les mêmes. Diane courbe doucement l'échine contre cette aile tendue. Elle plie enfin sous l'émotion qui la tenaille. Il n'y a pas de douleur, pas de peine ni de colère. Elle se rend simplement, comme un criminel épuisé. Elle se rend et s'enroule contre le plumage ébène. - Mon ange... Elle le répète silencieusement dans un simple souffle. Le train pigne dans le lointain mais, Diane ne l'entend pas. Elle n'entend plus rien. Elle s'évanouie contre elle. Elle n'est plus ici. Elle est ailleurs. Dans un ailleurs, bercée en coupe par deux grandes ombres qui caressent l'air dans un sifflement réconfortant.© fiche par Ell, optimisée par Superno√A pour ASN
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