Avant de faire vivre une rumeur, il faut apprendre à vérifier la véracité de cette dernière. » Sonja

Sonja & Hécate

Rachel se tient face à moi, buvant une gorgée de son café. Je viens de lui apprendre le moment étrange vécu avec notre amie en commun, Maude, récemment, alors que nous étions dans une boutique de vêtements. Elle s’est précipitée vers quelques rayons, a essayé quelques robes, avant de les remettre et d’acheter celle que j’aurais prise, moi, si j’en cherchais une et Rachel ne semble pas bien étonnée. Elle aussi trouve son attitude bizarre, surtout depuis mon retour. En la voyant mordre sa lèvre inférieure, je pose ma main sur son bras afin d’attirer son attention et lui dis : « Qu’est-ce qui se passe ? » Elle me cache quelque chose. Depuis le temps que nous sommes amies, j’ai appris à la connaître. « Maude a peur, je pense. » Peur ? Peur de quoi ? « Elle s’est toujours sentie à l’écart dans notre petit groupe de trois. Elle n’a jamais su faire la part des choses, ni se poser les bonnes questions en temps et en heure. » Maude n’aime pas se remettre en question et elle bavasse tellement que je n’ai jamais su lui confier les choses importantes. C’est comme ça qu’elle a su le jour de sa rencontre avec mon ex-époux qu’il était mon conjoint et que notre relation durait depuis un an, chose qu’elle n’a pas apprécié. Rachel hausse les épaules. « Mais tu connais Maude. » « Si elle savait garder un secret et si elle avait un peu plus de respect pour autrui, peut-être que je ne l’aurais pas mise à l’écart. » Je suis consciente que je n’ai pas aidé à ça, mais si c’était à refaire, je ne changerais les choses pour rien au monde. Maude m’a prouvé par a + b que je ne pouvais lui faire confiance que sur quelques points, alors j’ai voulu me préserver, mais elle n’en reste pas moins une femme intéressante avec qui j’aime passer certains moments.

Mon regard se pose soudainement sur la brasserie derrière nous, dans laquelle nous avions l’habitude de nous rendre à une époque. Rachel se retourne pour voir ce que je fixe et affiche un air triste. « Au fait… Tu as su pour Sonja ? » Je lui ai présenté mon amie une fois et le courant est bien passé. Faut dire que Sonja est une perle. Son souvenir me rend immédiatement le sourire, mais celui-ci s’efface lorsque la nouvelle tombe : « Je ne sais pas ce qui lui est arrivée, mais j’espère qu’elle est plus heureuse là où elle est maintenant. » « Comment ? » J’ai raté un épisode ? Rachel me regarde, la mine défaite. « De quoi est-ce que tu parles ? » « De son décès. Elle est décédée, tu n’es pas au courant ? » Au courant de quoi ? « Je ne sais pas comment, mais d’après certaines personnes, elle ne méritait pas ce qui lui est arrivé. » Mes pensées vont aussitôt vers son mari, mais je secoue la tête. Impossible. Rachel boit sa dernière gorgée, alors que je sors de ma poche mon portable, cherchant le numéro de téléphone de Sonja. « A en voir ta tête, tu n’es visiblement pas au courant. C’était une chouette fille. » Mais on m’aurait forcément mise au courant si c’était le cas. Je n’ai pas eu un seul message à ce sujet, je n’ai même pas vu un seul article de journal à ce propos. « Comment es-tu au courant de ça ? » « Du bouche à oreilles. » Mon cœur a un raté. Sérieusement ? « Ma belle, ce n’est pas que je n’aurais pas aimé continuer à en parler avec toi, mais je dois reprendre à bosser dans dix minutes. Tu m’accompagnes ? » Dans la précipitation, mon portable tombe à terre et je secoue la tête. « Non, va, on se rappelle pour se tenir au courant. » Hésitante, Rachel finit par acquiescer, dépose un baiser sur ma joue et pousse la porte du café après avoir payé sa consommation.

Je reste figée, assise, sur mon siège, en scrutant l’enseigne derrière la vitre. Je n’arrive pas à croire qu’elle n’est plus là… Que je n’ai pas été là. Peinant encore à réaliser, je m’habille de mon manteau, place le compte exact sur la table, pas une pièce de plus et je sors enfin du café. L’air frais me donne l’impression de mieux respirer. Alors que j’étais à deux doigts de partir, mes jambes me poussent en direction de la brasserie. A l’intérieur, l’ambiance est la même. La décoration n’a pas changé et les gens aux commandes non plus. Les clients, eux, par contre, sont différents. Je fais quelques pas entre les tables, me remémorant les moments passés avec Sonja, parfois avec Rachel en notre compagnie. C’est ici où j’ai pris mon courage à deux mains pour faire comprendre à mon amie que je savais, pour son mari, mais elle a nié recevoir des coups et la conversation s’est orientée vers autre chose. J’aurais pu insister, mais j’ai eu peur de la brusquer… Mes yeux s’arrondissent lorsque j’aperçois la silhouette d’une femme que je connais trop bien. De cette femme. « Merde, Rach’. » soufflé-je, en pressant le pas vers la femme. J’effleure la table où elle est installée, le cœur battant. « Sonja. » murmuré-je, soulagée, peu rassurée, inquiète. « Je suis tellement désolée de ne pas t’avoir donné de nouvelles. » dis-je, en posant mes mains sur ses épaules. « Tu ne vas pas croire ce qui m’est arrivée. Rachel m’a fait une mauvaise blague à ton sujet. » Je peinais vraiment à m’y résoudre. « Que je suis contente de te voir. Tu es de retour en ville définitivement ? Et tu n'as pas perdu ta vieille habitude, à ce que je vois. » Je suis ravie de la voir, en vie, en pleine forme, bien qu’elle semble plus pâle que d’habitude, peut-être, mais la rouquine est bien en face de moi. Souffle Hécate, souffle, cette rumeur n'était pas réelle. Elle était seulement lancée par des abrutis et reprise par les plus naïfs. « Tu attends quelqu’un ? » demandé-je, sans la quitter des yeux, comme par peur que la blague de Rachel se réalise.

Avant de faire vivre une rumeur, il faut apprendre à vérifier la véracité de cette dernière.

Pas très fraîche, je finissais d'avaler à grande gorgée mon mug de thé. Pfff... Pourquoi mon thermos de thé ne pouvait contenir qu'une si petite quantité de liquide ? Nan parce que franchement, un litre de thé, j'en buvais bien plus que cela en une matinée... J'avais tendance à me refaire un thermos pour l'après-midi mais bon, je le finissais avant la fin de la matinée. Debout devant ma paillasse, j'eus soudaine envie de m'endormir dessus. Quoique, si je posais juste ma tête dessus peut être que le froid aiderait à finir de me réveiller ? Parce j'étais vaguement fatiguée. Quoique en même temps... le froid avait assez peu d'effet sur moi. Je ferais mieux de me renversé un seau d'eau sur la tête mais j'avais tout de même quelques collègues qui allaient pas trouvé ça normal. Pff... Plus qu'à attendre encore une heure et ça serait l'heure d'aller manger. Sortir pour manger, sortir un peu m'aider à être plus efficace ensuite dans mon boulot et plus attentive à ce qui se passait. Soupirant encore, je pris mon calepin et décidais que j'allais passer la dernière heure à circuler dans les serres pour vérifier que tout allait bien. C'était beaucoup plus intéressant. J'adorais être au contact de la nature alors même si elle était ici sous serre, j'adorais ça... Au bout d'une heure, je revenais à mon bureau, sortais mon calepin de notes de ma poche et attrapais ma veste en échange. Je bricolais un ou deux truc rapide, comme prendre mon porte feuille, et partais, un bonnet bien enfoncé sur ma tête. Je sentais pas spécialement le froid mais voilà, il fallait se fondre dans la masse et j'étais très très douée à ce jeu là.

Et c'était pour ça que j'allais manger à la même brasserie tous les midi... enfin tous les midi où je me souvenais que je devais manger. Pas que je suis quelqu'un de très tête en l'air mais si parfaitement, j'étais très tête en l'air au point que j'en oubliais parfois que je devais faire comme les autres humains et manger souvent à heure plus ou moins régulière. Du coup, aujourd'hui je m'en souvenais surtout parce que j'avais besoin d'une pause mais c'était un peu pareil. Bref, toujours est-il que je mangeais dans la même petite brasserie agréable qu'à l'époque où j'étudiais dans cette ville. J'avais toujours apprécié le lieu et j'avais eu un peu la flemme d'en chercher un autre depuis. Je poussais la porte de la brasserie, laissant la douce odeur de cuisine venir me chatouiller les narines. Huuum... ça sentait toujours aussi bon depuis l'époque. J'avais juste pas aimé l'odeur des trippes la dernières fois mais ils ne cuisinaient pas cela très souvent. Allant au comptoir, j'interpellais la serveuse qui me connaissait à force. Bonjooour ! Je peux avoir une salade du jour s'il te plait ? Et un verre de cidre. Elle me répondit que ça arrivait et j'allais prendre place à une table de deux. J'attendais personne alors j'allais pas squatter une table pour plusieurs personne non plus. Mais j'aimais bien manger à ma propre table, avoir mon espace vitale en quelque sorte. Un espace que manger au comptoir ne me donnait pas. Je souris en voyant mon plat arrivé. Merci. Je commençais par boire une petite gorgée de cidre avant de sortir mon agenda de mon sac à main. J'étais en train de le feuilleter depuis quelques minutes déjà, ayant manger une petite bouchée de mon plat entre temps, quand j'entendis mon nom prononcé. Je relevais la tête pour apercevoir quelqu'un que je n'avais pas vu depuis un moment : Hécate. Une amie que je m'étais fait en arrivant au Canada, que je n'avais pas vu depuis... mon départ d'Ottawa quelques années avant ma... mort. Hécate! Elle s'excusa de pas avoir donné de nouvelles, excuses que je balayais de la main. J'en ai pas beaucoup donné non plus. Faute partagée? Je lui adressais un léger clin d'oeil. J'aimais bien Hécate, j'adorais Hécate même si la vie m'avait éloignée d'elle. Je frissonnais en sentant les mains de la jeune femme sur mes épaules, me projetant plusieurs années en arrière quand elle m'attrapais comme cela avant de rire et de marcher avec moi. Rachel ? Qu'est-ce qu'elle t'a dit? Je me doutais assez bien quel genre de mauvaise blague cela pouvait être puisque je savais très bien que ma mort n'était pas restée totalement secrète. Je l'écoutais me poser tous pleins de question en lâchant un petit rire. J'attends personne, alors assis toi ! Et commandes toi un petit truc. Je m'en voudrais d'être la seul à manger. Je fis signe de la main à la serveuse de revenir. Oui de retour en ville ! Et j'avais vraiment pas envie de chercher un autre endroit pour venir manger, c'est très bien ici! Et je me souvenais aussi que c'était elle qui m'avait montré l'endroit la première fois. Qu'est-ce que j'ai raté ces dernières années ? Et, en dehors de ses blagues peu drôles, Rachel va bien ? Et voilà c'était moi qui maintenant posait des questions à tout va !

Sonja & Hécate

L’entendre me parler, la voir bouger… Tout me rassure et je m’autorise enfin à fermer les yeux pour les rouvrir, plus détendue. Avec toutes les choses étranges qui se passent en ce moment, la vision d’Alan, je n’aurais été qu’à moitié étonnée de ne plus voir la rousse en face de moi, mais je suis soulagée du contraire. Sans pouvoir m’en empêcher, je presse son bras, pour m’assurer que tout est bien réel. « Et faute avouée, à moitié pardonnée, n’est-ce pas ce qu’on dit ? » Sur le moment, j’arrive à en vouloir à Rachel de ne pas avoir bien vérifié ses sources. A sa place, je me serais ruée au cimetière pour voir sa tombe, juste après avoir appelé mon amie plusieurs fois, en tombant sans doute sur son répondeur, mais je n’ai pas à le faire. Elle est bien là, vive, souriante. Et elle rit, qui plus est. C’est le meilleur son depuis nos retrouvailles. Je pousse la chaise et m’installe en face, cherchant du regard un ou une serveuse, avant de reposer mon attention sur mon amie, n’arrivant pas à détourner mon regard plus de quelques secondes. « Je ne sais pas trop pourquoi elle m’a dit ces choses-là… Elle aurait dû se renseigner. » dis-je, en me pinçant la lèvre inférieure, un peu gênée de lui apprendre la raison pour laquelle j’étais si angoissée. Mais je finis par le faire, en levant les yeux au ciel, dans un soupir. « Elle croit que tu es… plus là. » Je n’arrive pas à sortir le mot. Morte. Rachel croit qu’elle est morte. « Décédée. » Celui-là me semble moins dur, mais ce n’est qu’apparence. Il l’est tout autant. Aussitôt, je reprends, pour ne pas qu’elle soit blessée. Je l’aurais été à sa place. « Tu sais, les gens… Le bouche à oreilles. Parfois ils ne se rendent pas compte des rumeurs qu’ils lancent. Ils pensent que c’est pour s’amuser, que ça ne fait pas de mal. » Mais ça en fait. J’ai eu mal, lorsque Rachel m’a annoncé la nouvelle. Elle aussi avait l’air terrassé. Il faut dire que Sonja comptait aussi pour elle. Je presse la main de Sonja et lui adresse un faible sourire. Tout ça me peine vraiment.

« Tu as bien fait. » Ca m’a permis de me rendre compte de sa présence, de la retrouver. Je me tourne vers la serveuse qui vient d’arriver à nos côtés pour lui commander un café gourmand. Je n’ai pris aucun dessert lors de mon repas et j’aime les mini desserts qu’ils nous proposent ici, même si ça fait un moment que je n’y suis pas venue. La serveuse prend note, puis part aussitôt dans un sourire. « Tellement de choses… Et rien à la fois. » Je n’ose pas dire qu’entre Oreste et moi, c’est terminé. Je n’en ai pas l’envie, surtout. L’idée qu’elle me pense encore une Deslauriers me plait… Pourtant… « Je suis partie d’Ottawa il y a trois ans, tu sais. Après… » Un faible sourire et je me lance en essayant de noyer le poisson : « Après ma séparation, j’ai pris le large. La France est belle, l’Angleterre aussi. Je suis restée un an dans l’un, deux dans l’autre. Les gens n’ont vraiment pas la bonne mentalité. Tu verrais les sourires qu’ils ont lorsqu’ils m’entendaient parler. Apparemment, nous avons un petit accent qu’ils aiment bien, mais si tu veux mon avis, c’est plutôt le contraire. » dis-je, en arborant un sourire. « Ca m’a plu. Mais Ottawa me manquait beaucoup. Quant à Rachel, elle va bien. Elle est fiancée ! Elle est sur les préparatifs de son mariage en ce moment. » Elle semble heureuse et je pense que ce n’est pas qu’apparence. Rachel est une femme qui ne ment pas. « Et toi Sonja ? Que deviens-tu ? Ton… mari… ? » Je le déteste, cet homme. A mes yeux, il représente la pire espèce. Une pourriture de première. Est-il ici lui aussi ?

Avant de faire vivre une rumeur, il faut apprendre à vérifier la véracité de cette dernière.

Revoir Hécate... wahou, cela était particulier. Genre vraiment parce que c'était pas du tout prévu dans mon emploi du temps de la journée. Quoique... on peut discuter sur le fait que j'ai réellement eu un emploi du temps, autre que boire ce soir vu que je savais que je ne verrais pas Artémis puisqu'elle... ne me parlait plus. Mais bon, j'étais souriante quand je disais à Hécate que c'était pas sa faute, que c'était du moins tout au tant la mienne. Et elle me répondit que faute avouée était à moitié pardonnée. Je souris encore plus. Faute totalement pardonnée ! Je suis juste contente de te voir! Après tout... disons que je savais pourquoi je n'avais pas revu Hécate tout ce temps là. Du coup, j'étais simplement super contente de la voir, oubliant les raisons en question qui n'étaient plus de ma vie de toute manière. J'espérais juste que Rachel ne lui en avait pas trop dit parce que je serais assez gênée que Hécate fouille un peu trop et découvre les véritables raisons de tout cela. Surtout que... Je doutais qu'elle soit vraiment au courant de l'existence des gens comme moi, Sidh, ou encore des Faës. Et si elle le découvrait... mouef y avait mieux qu'en découvrant que ton amie est réellement morte non ? Je lui proposais de rester avec moi, l'invitant à prendre l'autre chaise de ma table. Et quel plaisir j'eus de voir qu'elle s'asseyait. Je pourrais savoir où elle en était avec cela... et où elle en était tout court dans la vie. Parce que ce n'était que maintenant que je me rendais compte à quel point sa présence m'avait manqué. Mais avant tout cela... elle me confirma ce qu'avait dit Rachel. Ouuuuups. Décédée... Rachel était tout de même totalement dans le vrai mais j'allais pas dire ça à Hécate. Non, fallais que je fasse un joli mensonge. Surtout qu'elle avait l'air d'en vouloir à Rachel pour cette fausse information et d'avoir répandu des rumeurs. Je fis une petite mue. Elle a du confondre avec quelqu'un d'autre tu sais. Genre des Sonja rousse, il ne doit pas y avoir que moi. Surtout que bon, je vivais plus ici et tout. Je pense vraiment qu'elle voulait pas te faire croire ça tout en étant pas sure tu sais... Je voulais pas non plus qu'elle finisse fâchée avec Rachel pour cette histoire là. Sauf que... je me mettais très bien à la place d'Hécate par rapport à ce genre de rumeur à la con. Mais bon, j'imagine si on m'avait dit que tu étais morte... Mon dieu, j'aurais vraiment pas apprécié la blague. Pas le moins du monde d'ailleurs. Mais bon, détournons la conversation avant que Hécate ne commence à poser des questions auxquelles je pourrais pas répondre...

Ma tentative de diversion orale marcha... plus que je ne l'aurais cru. Surtout que je fus aider par une serveuse qui vient prendre la commande de Hécate. J'en profitais pour mettre un peu de mon plat dans ma bouche, sentant mon estomac faire savoir que maintenant que j'étais venue manger, il fallait le remplir. Je demandais à Hécate ce qui s'était passé dans sa vie en trois ans. Elle commença pas une réponse plus qu'évasive alors que je lui faisais signe d'en dire plus avec la main. J'allais rire quand elle me dit qu'elle avait quitté Ottawa y a trois ans, juste au moment de mon retour en ville en fait. Sauf que j'entendis la suite... séparation ? J'avais bien entendu ? Tu es séparée d'Oreste? Choc... j'attrapais sa main dans la mienne alors qu'elle évoqua la France et l'Angleterre. Puis elle me dit qu'Ottawa lui avait manqué, ayant probablement pas entendu ma question à vrai dire. Je hochais la tête, comprenant son ressenti par rapport à cette ville. C'était aussi une des raisons qui faisait que j'étais revenue ici après ma mort, outre la présence de Sygrid dans cette ville. Ottawa avait son charme et il était dur de s'en défaire. Je souris en entendant que Rachel était fiancée. La mariage... quelle connerie pour ma part. Je suis contente pour Rachel mais... qu'est-ce qui s'est passé Hécate ? Je veux dire, toi et Oreste... pour moi vous étiez un peu le couple parfait. Mon dieu, je venais pas de dire les choses comme cela ? Tain, sobre je raconte vraiment que des conneries. Désolé, j'aurais pas du les choses comme ça. Je suis maladroite mais... je suis surprise. Comment tu vas? Ca a pas du être facile. Réalisant que je tenais toujours sa main, je la serrais un peu plus fort pour y faire passer tout ma compassion dedans. J'étais réellement désolé pour elle. Ils formaient un joli couple et de ce que j'avais vu et entendu, de leur part à eux deux, ce n'était pas qu'une impression. Je me demandais ce qui avait bien pu les amener à se séparer. Et le fait simple de savoir qu'ils n'étaient plus ensemble mais donner de l'inquiétude pour l'un et l'autre. Sauf que voilà quand on parlait de couple, j'aurais du m'y attendre. Hécate me demanda ce que moi aussi je devenais et ce que devenait mon très cher mari... Je dus retenir une grimace et attraper mon verre de cidre pour me rincer la bouche du goût amer qui s'y était installé. On s'est séparé. Je suppose que la nouvelle va pas te déplaire. J'adressais un clin d'oeil à mon amie, n'ignorant pas ce qu'elle pensait de lui. Ni le fait qu'elle se doutait de certaines dis-fonctionnalités de notre couple même si j'avais toujours nié. Ca fait à peu près... trois ans vu qu'on est en décembre tiens. Je suis revenue vivre à Ottawa après ça. Et... j'ai retrouvé de la famille à moi. C'est à peu près tout ce qui est notable depuis qu'on s'est vues la dernière fois. Et je suis morte aussi mais ça, ça se dit pas. J'espérais juste qu'elle me poserait pas trop de questions sur ma séparation. Parce que j'avais pas envie de lui mentir, pas le moins du monde. Mais j'allais pas pouvoir lui dire la vérité non plus... Délicate situation.

Sonja & Hécate

« Moi aussi je suis contente de te revoir. » Bien plus qu’elle ne se l’imagine. J’ai vraiment cru que je ne la reverrai plus jamais, mais me voilà à présent soulagée. Je fais un signe de la main à Sonja quand il est question de la rumeur qui court, de Rachel. Rien que d’y penser, ça m’énerve. Les rumeurs, c’est une chose, la prolifération de ces bestioles sans aucune preuve, c’en est une autre. Dans notre société actuelle, avec Internet, c’est une vraie plaie. C’est notamment pour cette raison que j’ai vérifié la confidentialité de mon profil Facebookien et que je suis sur l’oiseau bleu juste pour mon métier. Je n’y ajoute généralement rien de très personnel. Il suffit d’un rien pour qu’on balance à votre sujet et je n’arrive pas à comprendre comment de telles insinuations au sujet de Sonja ont pu débuter. C’est dingue. « Je sais très bien que ce n’était pas méchant de sa part, qu’elle n’a pas voulu me faire de peine… C’est juste que ce n’est pas drôle d’apprendre ces choses-là et de constater, peu après, que ce n’est qu’une vaste blague d’un crétin qui a voulu un peu trop jouer avec les nerfs des autres. » Je suis certaine qu’au fond de lui, il s’est dit que ça ne durerait qu’un temps, que c’était pour rire et que tout le monde allait s’amuser, mais non, pas vraiment. Si je le tenais, je crois que je lui gueulerai dessus comme du poisson pourri. « Ouais ! Je n’ose même pas imaginer la tête qu’auraient faite mes parents ! » Je lâche un rire, me détendant enfin. C’est du passé, maintenant.

« Oui et je n’ai toujours pas mis mes parents au courant. Ils m’envoient un mail toutes les semaines en me disant qu’ils prennent soin de lui. » Ah la galère. En partant, j’ai seulement fait part de la chance que j’avais à partir en France et c’est vrai que c’était une sacrée opportunité… C’est juste que j’aurais peut-être dû faire ça dans les règles, mais je n’ai pu m’y résoudre. « Je n’ose pas imaginer la tête d’Oreste quand il a vu mes parents se planter chez lui… Je ne sais même pas s’il se doute de la vraie raison. » C’est de la gentillesse, mes parents tiennent énormément à Oreste. Pour eux, c’est le gendre parfait et à mes yeux ça l’était aussi. C’est difficile d’admettre que tout est terminé, alors j’ai préféré ne pas faire face à ce qui se passait réellement, pas en sa totalité du moins. Trois ans que je leur mens, tout de même. Je resserre la main de mon amie. « Je n’en sais rien, pour être honnête. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Il… passait par des choses difficiles. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Nous nous ne sommes pas fait mal. Je sais qu’il m’aimait toujours. » Je l’ai vu dans ses yeux, je l’ai senti dans le ton de sa voix. Je n’ai donc rien suivi. « Enfin… Le couple parfait. Tu me flattes. » A mes yeux nous l’étions aussi. Oreste a fait de moi quelqu’un de meilleur, de plus stable. J’ai beau être constamment enthousiaste, ne pas baisser les bras, je me suis tout de même perdue depuis notre divorce. Il me manque. « Ce n’est rien, ne t’en fais pas. Et… Ca va. J’ai l’intention de comprendre, tu sais. » Ce qui n’est pas facile, c’est de ne rien comprendre, d’être convaincue que la flamme n’est pas éteinte et de ne pas être auprès de lui. Il n’y a pas que moi qui a dû vivre des moments difficiles. Elle aussi, avec son ignoble mari. Un sourire s’affiche sur mon visage. « Tu penses bien que oui ! Je le détestais tellement pour tout ce qu’il te faisait. » C’était un personnage horrible. Plus d’une fois j’ai eu envie de lui rentrer dedans, avec ma force de mouche. « Comment ça s’est passé ? Il t’a laissé partir ? Vous n’avez plus aucun contact ? De la famille à toi ? » Je pose plein de questions à la fois, mais j’ai vraiment envie de savoir. « Tu as de la famille ici ? »

Avant de faire vivre une rumeur, il faut apprendre à vérifier la véracité de cette dernière. » Sonja

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