Tout le monde sait ce qu'on dit sur les mères juives ... Tu es d'avis que tout cela n'est qu'une vision très atténuée de ta réalité. Quiconque connaîtrait ta mère, prendrait ses jambes à son cou, ou compatirait à ta douleur. Parfois, on te demande tout simplement pourquoi tu plantes pas ta mère là pour vivre ta vie. Facile à dire, pas si facile à faire ! Déjà que pour les humains, c'est quasiment impossible de se débarrasser de sa mère juive, quand tu es en plus un Djinn, tout comme ta tendre maman, autant te dire qu'il faut abandonner l'idée. Elle te retrouverait à l'autre de bout de la terre ou six-pieds sous terre pour te faire payer de l'avoir planter. Non, vraiment, tu pourrais absolument pas t'en défaire. C'est pour cela que cette belle après-midi, après ton service du midi et avant celui du soir, tu te retrouves à tenir par le bras ta minuscule maman Djinn pour l'emmener faire sa mammographie de dépistage. Tu as pas vraiment compris pourquoi elle fait ça sachant qu'elle n'est pas humaine et qu'elle a plus de 280 ans en réalité, mais elle t'a coupé la parole brusquement et menacer de l'index si tu venais pas avec elle. Autant te dire que tu n'as vraiment pas eu le choix !

En partant de votre appartement à la cour des Faës, tu as encore essayé de la faire changer d'avis, mais c'était peine perdue ! Alors, avec votre dégaine spéciale, pieds nus, cheveux et barbe au vent, ta maman dans une robe boubou en coton très ample, serrée à la taille par une ceinture dorée horriblement clinquante, des boucles d'oreille assorties et une ribambelle de bracelets qui cliquettent à ses bras, et toi avec un pantalon de lin beige et un débardeur blanc, vous aviez l'air tout droit sorti d'un film dans le désert, style Mille et une nuits. Qu'importe, tu avais eu beau la tanner, ta mère avait voulu s'apprêter comme si elle allait voir le sultan, telle Shéhérazade au milieu d'un harem d'hommes d'Orient. Tu aurais du t'en douter, à ce moment là, qu'il y avait un truc pas net dans cette histoire, mais non, grand machin sans cerveau que tu peux être parfois -surtout quand il s'agit de ta mère en fait- tu n'avais rien vu venir.

Bon gré mal gré vous arrivez à l'hôpital suffisamment tôt pour être à l'heure au rendez-vous. Après quelques dizaines de minutes à vous engueulez l'autre comme deux marchands de tapis dans un souk à Bagdad, vous trouvez enfin le service et la bonne salle d'attente. Après un bref passage vers la secrétaire -évidemment tu t'y colles car ta mère trouve que la secrétaire "n'a pas une bonne tête"- tu finis par revenir auprès de ta maman qui attend sagement avec son propre magazine en arabe dans les mains ... Tu allais t'asseoir près d'elle quand elle te fait signe de t'en aller. Tu comprends pas vraiment et d'un grognement, proteste. Qu'importe, elle te fait les yeux auxquels il ne vaut mieux pas désobéir. Très bien, larbin pour larbin, tu attendras madame dehors. Là encore, tu aurais du trouver ça louche, ta mère te prenant toujours comme une espèce de garde du corps très décourageant pour toute forme de délinquance et là, elle voulait que tu t'en ailles ...

Tu finis par te trouver un petit coin tranquille, après avoir arpenté les couloirs en entendant sur ton passage les chuchotements dus au fait que tu étais pieds nus -mais les gens ne pouvaient-ils pas s'occuper de leur cul ?. Une machine à café. Quelle aubaine ! Tu balances la monnaie dedans et récupère un thé vert à la menthe et des petits biscuits. Tu t'avachis sur une chaise en métal qui passait par là et tu grignotes ton goûter en attendant ta mère. Tu allais sortir ton téléphone pour vérifier si tu n'avais pas de nouvelles -à tout hasard- de la Marquise, et puis, constatant que non, tu soupires longuement. Tu croises les mains derrière ta tête et t’apprêtes à faire un somme appuyé contre le mur quand une charmante infirmière passe. Une bombe atomique. Une blonde assez pulpeuse tout en restant fine -bon d'accord tu préfères les grassouillettes, mais là honnêtement tu n'allais pas te priver pour mater !- avec un sourire un peu effrayant et une peau terriblement blanche. Tu penses immédiatement que le mélange de son blanc laiteux avec ton caramel torride serait du plus bel effet dans un lit d'hôpital et ton pantalon en lin se déforme un peu pour illustrer tes pensées cochonnes.

Alors, profitant qu'elle se tourne vers une chambre, tu te lèves lentement, sans bruit et attend qu'elle revienne à son chariot de médicaments pour poser innocemment ta large paume sur son fessier rebondi ...