Love Crime | Ft. Daniel & Shannon

Love Crime
Daniel Klein ✤ Shannon Locklainn ✤ Märta Klein

❝ The chase to end all time. ❞

Ses fragrances étaient là. Partout. Incessantes. Tel un rappel, un leitmotiv qui l'accablait chaque jour davantage. Parfois, elle se surprenait encore à passer quelques produits sur son minois déconfit. Mais en vain. Elles persistaient à corrompre la moindre parcelle de sa chair. Shannon. Elle ne prononçait que très rarement son nom et, pourtant, il ne cessait d'étendre son joug accapareur entre les parois nébuleuses de sa pauvre conscience. Par quelle destinée hasardeuse s'était-elle jetée, ainsi, dans la gueule béante de l'agneau ? Elle n'en était plus certaine. Cela n'avait aucun sens. Shannon. Quelle folie l'avait enseveli ce fameux soir où, elle avait autorisé cette délicieuse hérésie ? Qu'avait-elle cru espérer en s'offrant impunément sur le linoléum ? Le risque était imminent. Et, il l'était d'autant plus désormais. Elle ne parvenait plus à soutenir la rétine perçante de cet homme qui, depuis bien des années, peuplait chacune de ses heures. Qu'adviendrait-il d'elle, de cette malheureuse s'il découvrait les travers dans lesquels elle les avait propulsé ? Il y aurait-il, seulement, une échappatoire ? Rien était moins sûr. Elle connaissait les délires extatiques de son époux. Elle savait, pertinemment, que la finalité ne serait qu'une mer éparse ; martelée de perles salées et pourpres. Alors, pour quelles raisons s'était-elle pendue à la gorge de cette créature répugnante ? Là encore, seul le « tic-tac » du glas s'obstinait à y répondre. Peut-être était-ce cela ? Une plainte à la fois affligée et désarmante. Une volonté inexprimable de frôler le vide, ne serait-ce que du bout des ongles. Tenait-elle à son existence placide ? Ce nœud de vipères était bien trop torride pour y trouver une quelconque logique. Représentait-elle finalement que cela ? Qu'une simple brèche dans laquelle elle s'était engouffrée dans l'espoir de taire un quotidien désenchanté ? Peut-être. Il suffisait d'effleurer sa peau d’albâtre pour faner les dernières lueurs de beauté. C'était une réalité qu'elle avait appris à apprivoiser malgré elle : elle pourrissait les inspirations avortées du monde qui l'entourait. Elle se faisandait elle-même. Et, sans doute par égoïsme, elle s'évertuait à s'agripper aux branches fragilisées qui surplombaient encore sa chute. Shannon. Cette jeune femme, au regard brillant d'une braise incandescente, se briserait, par sa faute, au pied de sa propre falaise. Elle l'avait déchiqueté dans sa charpie. Et, il ne resterait bientôt plus rien de ses aspirations.

- Shannon ?, chuchota-t-elle.
Là, encore dissimulée par la pénombre qui régnait en ces lieux sinistres, Märta contemplait la l'ossature recroquevillée de la jeune femme. Elle aurait souhaité s'approcher. Ou, peut-être déposer une énième fois sa paume contre la courbe délicate de son visage. Mais, elle ne fit qu'enlacer sa propre silhouette. La culpabilité était une venin tenace qu'elle ne savait plus dompter. Et, bien qu'elle n'aurait su réellement exprimer l'indubitable nature de ce ressentiment, la certitude d'avoir dressé elle-même la potence de son interlocutrice lui sciait l'estomac. Elle inspira profondément l'air âcre, passa une main chevrotante dans sa chevelure blonde.
- Il faut que je vous fasse sortir d'ici..., ajouta-t-elle gravement.
De quelle manière ? Elle l'ignorait. Daniel n'autoriserait jamais une telle entreprise. Cérémonieusement, elle descendit les dernières marches. Son regard, voilé d'une acuité désarmante, vint trouver au refuge au cœur de celui qui lui faisait face. Quelques saveurs familières vinrent l'étourdir, si bien qu'elle dut empoigner plus aisément ses bras pour ne pas définitivement choir sur le sol. Dans quel bourbier s'était-elle immiscée ? Elle n'en était pas certaine. Mais, une chose était sûre : elle n'en sortirait pas indemne. Elle se racla la gorge. En attendant, elle se devait de maintenir une contenance raisonnable.
- Je vais essayer de vous faire sortir d'ici, précisa-t-elle.
Un rictus à la fois craintif et tendre torpilla sur ses lèvres. Un pas qu'elle ne connaissait que trop bien faisait, présentement, écho au tintement lancinant de son myocarde. Daniel. Sa carcasse s'immobilisa en une stature méfiante. Elle n'avait pas le droit à l'erreur. Un dernier coup d’œil à Shannon lui permit de quémander un silence sépulcrale de sa part. Ce combat – si toutefois l'on pouvait le nommer ainsi – était le sien.
- Daniel, déclara-t-elle lorsque sa silhouette se découpa dans l'ombre.
Ses prunelles avides vinrent alors s'accrocher aux siennes. Elle fit un pas. Puis un deuxième. Et, ses phalanges trouvèrent appui contre sa joue.
- Qu'allons-nous faire d'elle ?
Faussement désinvolte, Märta haussa mollement ses frêles épaules.

Les dés étaient lancés.

Je suis arrivé(e) le : 21/12/2015

Debout, face à l'une des imposantes fenêtres géminées de leur demeure, Daniel était contemplatif. Le regard rivé vers l’extérieur, il observait le parc plongé dans l'obscurité de la nuit. Seuls les rayons lunaires éclairaient le vaste jardin, donnant à la scène un côté irréaliste. Le Zéphyr agitait la cime des arbres, inlassablement. Ceux-ci pliaient sous la force du vent, mais ne cédaient pas.

L'homme semblait serein, mais ce n'était qu'une apparence. Dans son esprit tortueux erraient des pensées obscures ; Images de chair mise à nu et folies morbides... C'était un abîme constant.

Alors qu'il était en proie à de vagues réflexions misanthropiques, un bruit familier le fit sortir de ses pensées. La porte de la cave.. Märta. Qu'allait-elle faire en bas ? Ses allées et venues aux sous-sols étaient ces derniers temps un peu trop excessives au goût de Daniel. L'humaine qui pourrissait sous leurs pieds ne méritait pas autant d'attention. Tel était l'avis de Klein.

La curiosité piquée à vif, il décida de suivre le même chemin que sa femme. C'est à pas de velours qu'il gagna le « ventre » de leur résidence, gardienne d'un sinistre secret. Il y trouva Märta, postée non loin de La misérable chose.

Le prénom masculin prononcé, résonna contre les murs froids et austères du lieu. Märta réduisit la distance qui les séparait. Sa main gracile vînt à l'encontre du visage anguleux de Daniel.. Le contact était toujours aussi électrifiant, même après plus de trois cents années de vie commune. Elle était la seule qu'il « aimait », malgré que l'Amour qu'il lui porta fusse fils du chaos.

La question posée n’obtînt pas immédiatement de réponse. Le Stryge scruta momentanément sa moitié, avant de se défaire de sa douceur. Il fit quelques pas en direction de la masse fragile, posa sur elle un regard emprunt d'un incommensurable dédain. Shannon Lockart. L'indésirable... Une vague moue dubitative anima momentanément les traits du visage de Klein, avant qu'il ne prenne la parole. « La prudence me conseille de lui ôter la vie. » Une lueur malsaine traversa ses orbes sombres. Il pouvait la vider de son sang, progressivement. Jusqu'à la lie, jusqu'à la mort. Ou la dévorer, ingurgiter sa chair et ses entrailles. Daniel était friand de ces choses là, Märta le savait. Que Shannon connaisse une telle finalité n'aurait rien d'étonnant.

Il se détourna de la misérable larve humaine, puis reporta son attention sur Märta. Scrutateur, Daniel était à l’affût du moindre tressaillement, du moindre détail dénonciateur. Car Monsieur calculait et analysait tout et tous, même sa propre femme. « Réduite au silence à tout jamais, elle ne représenterait plus aucune menace...» Un silence pesant s'en suivit.

« Cela me semble être la meilleure alternative. Mais qu'en penses-tu, Märta ? » Question piège ? Sans doute. Avec Daniel, la méfiance était toujours de mise - Ici, la logique voulait que la Stryge approuve et encourage cette idée. Après tout, c'était pour elle qu'il avait enfermé l’éphémère dans leur sous-sol, à l'écart du monde et des oreilles attentives. Et surtout à l'écart du procès dans lequel était impliqué Märta.

(c) AMIANTE

Love Crime

Shannon Locklainn, Märta & Daniel Klein

Il n'y a que le noir. L'ombre ténébreuse qui nécrose ses pensées tortueuses. Où est donc partie la lumière ? Est-elle seulement quelque part, ailleurs ? Shannon l'ignore, Shannon s'endort. Il n'y a plus rien que des souvenirs, et ceux-ci menacent eux aussi de prendre la fuite. Mais ils auraient bien raison. Des jours se sont écoulés depuis sa dernière permission. La prison a refermé ses bras autour d'elle, et, désormais, elle pâlit dans son étreinte. Lorsqu'elle prend une grande inspiration, l'atmosphère glaciale lui offre quelques secondes de répit, temps pour son cœur de s'amoindrir, et la chaleur s'évapore entre ses lèvres. Elle serre dans le creux de ses bras ses jambes, et frémit. Quand sortira-t-elle encore ? Elle l'ignore, il n'y a plus de temps, elle ne sait même plus si quelque chose d'autre existe pour elle, là, dehors. Elle tremble. Depuis des jours, des nuits, des semaines, peut-être, elle tremble. Si les pleurs se sont tus, ses sanglots, eux, ne sont qu'omniprésence. Ils flagellent son dos endoloris. Le néon a cessé de clignoter. Il ne tinte même plus, et l'ampoule est prête à s'éteindre, pour abandonner la pièce avec elle. Shannon s'accroche encore à cette piètre source lumineuse, mais elle sait que, bientôt, il n'y aura que le néant total. Qu'adviendra-t-il d'elle, alors ? Saura-t-elle encore trouver une issue à cette réalité cauchemardesque ? Elle prie pour que cela soit le cas. Mais, là encore, elle ne sait rien de ce qu'il va se passer. Des pas résonnent en haut, et elle reconnaît la démarche féminine de la maîtresse des lieux. Märta. Elle est tout près, et pourtant, elle semble à l'autre bout du monde. D'un geste, elle relève la tête, comme si le plafond allait s'effondrer. Elle l'espère, presque, au sein de son myocarde. Elle suit attentivement le chemin emprunté, et lorsque la trajectoire s'approche tranquillement de l'entrée de sa cellule, son organe rate un battement.

Märta. Depuis combien de temps ne l'a-t-elle pas vue ? Une éternité, certainement. Ces derniers temps, ses repas vont et viennent lorsqu'elle dort. Elle ne voit rien. Alors elle tente désespérément de garder l'oeil ouvert. Jusqu'à tomber de fatigue, opportunité pour Miss Klein de venir sans rester. Pourquoi l'évite-t-elle ? Shannon le sait très bien. La dernière fois... Non. Elle chasse ses souvenirs, bien qu'ils s'entêtent, bien qu'ils cherchent à percer sa carapace. Elle ne doit pas y penser, et elle le sait. Elle ne veut absolument pas y réfléchir. Elle ne veut pas sombrer dans une décadence étrange, dans une affection malsaine. Märta. Et elle entre, elle approche, alors que Shannon essaie de recracher la sensation de ses sens. Elle ne veut pas se souvenir. Elle ne veut pas. Elle refuse catégoriquement de se remémorer leur nuit passée ensembles, les attentions de Märta, ses dires, ses gestes, ses baisers. Non, non, non. Elle ferme les yeux, ne lui répond pas. Si elle s'endort, partira-t-elle ? Elle n'a pourtant pas envie qu'elle parte. Elle voudrait la voir rester, encore et encore. Mais surtout, surtout, elle voudrait sortir d'ici, remonter, là-haut, boire, manger, se doucher, la toucher, recommencer. Mais il n'en est rien, bien sûr. Il ne peut que se soumettre aux désirs de sa Maîtresse. Elle ne peut rien dire, elle ne peut rien penser, elle ne peut rien avouer. Elle doit se taire, simplement, être la victime qu'elle est censée être.

A sa première phrase, Shannon relève finalement la tête. Son regard se pose sur elle, et elle la contemple. Märta. Sa beauté n'a de cesse de la hanter. Et, pourtant, elle semble encore surprise de la redécouvrir. Elle avale sa salive. Seigneur. Elle fronce les sourcils.

« Qu... Quoi.. ? »

Sa voix ne parvient même plus à briser ses propres tympans. Si bien qu'elle a l'impression de ne pas avoir parlé. A-t-elle réellement ouvert la bouche ? Elle l'ignore elle-même. Mais, lorsque sa Maîtresse répète sa phrase, elle répond étrangement à son sourire. Doucement. Affectueusement. Elle aimerait la remercier, elle aimerait lui dire beaucoup, mais elle n'a pas le temps. Elle n'en a plus désormais. Lorsque la porte s'ouvre, et que l'ombre élargit les ténèbres de la pièce, le sourire de Shannon s'envole avec eux, et elle recule contre le mur, jusqu'à sentir son épaule la tirailler. Si elle pouvait fondre avec lui, elle le ferait. Mais elle ne peut pas se cacher. Ses menottes tintent, ses chaînes crissent, et elle sent tous ses muscles se tendre. Daniel. Son cauchemar. Son démon. Ce qu'il lui a fait ? Elle ne s'en rappelle que partiellement. Mais il est des instincts qui ne trompent pas.

Elle les écoute, elle entend tout. Et les gestes de Märta envers son charmant mari l'indiffèrent. Habituellement, peut-être, aurait-elle été légèrement pincée de jalousie. Mais la panique qui la surprend la rend folle. Alors elle recule, encore, comme si un échappatoire s'offrait derrière elle. Mais non, rien, elle doit écouter, elle doit supporter. Que va-t-il advenir d'elle ?

Fiche de liens (c) Miss Yellow

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