Wasting my young years + Ft. Artemis

WASTING MY YOUNG YEARS

See my dreams all die

C'est inconfortable. Il lui suffit d'ancrer son regard dans le sien pour le voir. Elles sont aussi godiches l'une que l'autre, aussi gelées par ces douloureuses retrouvailles. Les bras ballants, ainsi prostrées l'une en face de l'autre, elles sont semblables à deux étrangères que le temps rassemblerait enfin. Il y a tant à dire et, pourtant, rien ne daigne véritablement s'échapper. Diane triture nerveusement ses doigts, ne sait clairement plus où poser ses prunelles déconfites. Le distance qui les sépare de nouveau l'afflige plus qu'elle ne l'aurait pensé. Elle aurait aimé se perdre de nouveau, encore et encore, au cœur de ses bras, s'imprégner de sa chaleur. Elle n'en aurait jamais assez. C'est un fait. Mais elle ne peut que s'en blâmer. Cette situation n'est ainsi qu'à cause de sa lâcheté, qu'à cause de sa faiblesse. Elle s'humecte les lèvres, papillonne des cils nerveusement. Elle n'est qu'un pâle reflet de la femme qu'elle fut. L'assurance, le dynamisme qui la caractérisait n'est plus. Elle aimerait pourtant; sourire au souvenir de cette fillette, lui offrir enfin la mère qu'elle attend et qu'elle mérite indéniablement. Mais, Diane n'en est pas capable. Elle pourrait, oui, jouer le jeu, mentir sur ce qui l'anime profondément. Seulement, ce n'est pas ce qu'elle souhaite pour Artemis. Elle ne veut pas n'être qu'un mensonge éhonté. Alors, elle enfonce ses poings dans les poches de son trench, les crispe jusqu'à la déraison. De loin, la scène semble n'être celle que d'un mauvais film dramatique. Elle en rirait presque si cela ne l'impliquait pas sa fille. Pourquoi faut-il que son existence ne soit qu'un mauvais récit ? Elle hausse imperceptiblement ses épaules, davantage pour elle-même et se voûte quelque peu.

- M'man, j'suis plus une gosse. J'ai largement passé la majorité.
Evidemment. Cette réalité lui arrache un triste rictus. Artemis ne l'a pas attendu pour grandir, s'épanouir telle une fleur. Diane se racle la gorge, visiblement mal à l'aise. Elle se sent tellement stupide, là, aussi droite qu'un piquet à ne débiter que des inepties sans intérêt. Elle secoue sa petite tête, bêtement, réprime un souffle faussement amusé.
- C'est vrai, oui. Excuse-moi...
S'excuser. Elle n'est présentement capable que de cela. Elle n'est pas dupe, il faudrait bien plus que cela pour apaiser toutes les plaies qu'elle lui a infligé en s'évanouissant dans le néant. Silencieusement, donc, Diane serpente à la suite de la jeune fille à travers les rues quasi-désertes. Il est trop tard pour fouler les pavés, mais bien trop tôt pour désemplir un bar. Elle arque un sourcil critique à la cigarette que sa fille coince entre ses lèvres. Elle ouvre la bouche, puis finalement, saisit celle qu'elle lui tend sans commenter. Lorsqu'elles entrent enfin dans la bâtisse, Diane ne peut que frémir d'embarras. Les vapeurs d'absinthe grise ses sens et, elle se voit contrainte de dissimuler ses mains tremblantes dans son dos. Elle était trop jeune à l'époque, trop innocente pour comprendre réellement les enjeux, pour assimiler véritablement ce qui se déroulait dans l'ombre. Elle ne comprenait pas que sa mère annihilait désespérément son quotidien sous des flots d'alcool. Et qu'en est-il, justement, de cette dépendance mortifère ? Diane inspire bruyamment, se fait violence pour ne pas céder à la panique qu'elle sent poindre entre ses cotes.

- Tu es....euhh comment dire. Depuis quand tu es revenue ? De l'autre monde et.... à Ottawa ?
Diane tapote nerveusement ses ongles contre le verre, alors qu'elle tire avec acharnement sur la cigarette entre ses lippes. Elle redoutait un peu cette question. A dire vrai, elle les redoute toutes. Elle s'agite un peu sur son siège, passe une main tremblante dans ses cheveux.
- Quelques années, balbutie-t-elle honteusement, j'ai... c'est ton amie. Sonja. Elle... m'a guidé. Essayé du moins. Et puis... elle m'a parlé de toi et...
Diane secoue la tête. Que c'est délicat. Elle n'est définitivement pas prête pour toute cette merde. Alors, elle saisit enfin le godet placé devant elle, en ingurgite une longe gorgée.
- Pour être... totalement honnête envers toi, je... ça fait quelques mois... que je... te suis. De loin. Je n'ai pas osé... je me suis dis que tu ne voudrais probablement pas...
Elle soupire, agacée par sa propre impotence.
- Je suis tellement nulle pour ça. Je suis désolée Artemis. Je voulais te parler. J'ai essayé plus d'une fois mais... je suis une mère de merde.

Je suis arrivé(e) le : 21/12/2015

LITTLE GIRL, LITTLE GIRL, DON'T LIE TO ME

Tel me where did you sleep last night ?
In the pines, in the pines, where the sun never shines.

Jeune ? Ouais, ça valait encore quand j'avais dix ans. Mais depuis la mort de ma mère, j'avais vieilli moi aussi. J'étais bien loin d'être cette gamine que j'étais par le passé. J'étais maintenant majeure depuis une paire d'années.... même si je devais avouer que la cigarette et l'alcool avaient commencé avant cet age symbolique. Je regardais alors ma mère qui s'excusa en vain. Décidément, ça allait être le ton de la soirée, s'excuser encore et encore. Comme si c'était possible de faire disparaotre son absence et tout ce qu'elle avait entrainée avec de simples mots. Si seulement les choses étaient aussi faciles. J'aurais aimé qu'elles le soient, ça m'aurait évité pas mal d'ennuis pour sur. Mais nous étions des êtres infiniment plus complexes que ça, je l'avais très bien appris au cours de mes études. J'avançais automatiquement vers le premier bar du secteur. Sur le trajet je m'allumais une cigarette par automatisme... je vis très bien que ma mère réagi mais je n'en avais pas grand chose à faire. Elle n'avait plus vraiment d'autorité sur mes actes. Par chance elle préférait garder le silence puis accepta celle que je lui tendis. Après tout, elle n'avait pas grand chose à dire. Boire, fumer, c'était ce que j'avais pu voir d'elle pendant mon enfance.... et encore une fois je prouvais que j'étais vraiment trop proche de ma mère sur mes mauvaises habitudes.

J'entrai naturellement dans l'établissement et alla prendre place au niveau du comptoir. Je me sentais comme un poisson dans l'eau. Ainsi je me dirigeais mécaniquement vers le cœur de ce lieu, le comptoir du bar. J'avais toujours ma cigarette au coin des lèvre alors que je commandais au barman deux verres de whisky. Bon. Je supposais que les questions pouvaient commencer. Je ne savais pas vraiment pour ou commencer. Après dix années sans se voir, je supposais que les choses avaient largement changé pour elle. Je ne savais pas vraiment ce qu'avait pu être sa vie. Je ne connaissais pas grand chose à l'initiation sidh, même Sonja ne m'avait rien raconté à ce sujet. La première qui vint à l'esprit, c'était depuis quand elle était revenu du monde des morts. Et depuis quand était-elle ici à Ottawa. Je pris ma cigarette entre mes doigts et saisi mon verre de l'autre alors qu'elle avouais etre à Ottawa depuis plusieurs années. Sonja. Quand ce prénom parvint à mes oreilles je m'arrêtai net de boire et toussais légèrement. Mon amie. Ok. Peut-être qu'elle ne lui avait pas dit que j'avais couché avec elle. Parlé de moi et.... et QUOI PUTAIN ? Je sentis le rouge me monter aux joues. Ok, c'était gênant ça. C'était très gênant. Sonja.... c'est quelqu'un de formidable, dis-je tout bas alors que j'attrapai un cendrier non loin pour taper la cendre de ma cigarette. Elle et moi... Je posais la cigarette à mes lèvres pour prendre une longue bouffée de fumée. Laisse tomber, y'a rien à dire, ouais c'était mieux comme ça. Je ne me sentais pas vraiment à l'aise avec le fait de parler des mes anciennes relations de cul avec ma mère.... vraiment. D'une parce que la liste était foutrement longue. Et de deux parce qu'aujourd'hui j'étais en couple et heureuse. J'avais fait une croix sur tout ça.

Je relevais le regard vers Diane alors qu'elle me faisait part de sa volonté d'être totalement franche avec moi. Par réflexe je me mis à froncer les sourcils, en me demandant ce qui allait me tomber sur le coin de la gueule, encore. Je me figeais alors qu'elle était en train d'avoir qu'elle m'avait suivi, depuis plusieurs mois. Elle m'avait suivi depuis plusieurs putain de mois ? Putain. Je n'étais pas en train de devenir folle. Ces sensations elles étaient réelles. Je ne l'avais pas imaginé. Bordel de merde ! Une mère de merde. Arrête de t'excuser ! Tu me saoules là. C'était parti tout seul. Ouais fallait pas abuser quand même. Je finis par écraser ma cigarette dans le cendrier, de toute manière elle était déjà consommée en totalité. T'es pas... parfaite, mais t'es pas une mère de merde. Je... Je me redressais vers elle et la fixa droit dans les yeux. ... j't'aimais. Et t'étais tout pour moi. Pourtant je t'ai vu quand tu buvais à perdre conscience, quand j'étais gosse je ne comprenais pas pourquoi tu étais comme ça. Pourquoi grand-mère m'empêchait de te voir comme ça. Mais BORDEL. Je pris une seconde pour reprendre ma respiration, j'avais presque l'impression d'avoir couru un marathon à cet instant. T'étais ma mère et j't'aimais plus que tout.... et c'est toujours le cas. je finis par attraper mon verre et le descendre d'une traite. Bon. Ok. On faisait mieux niveau retrouvailles mais au moins, c'était à notre image. Cabossée. De retrouvailles idylliques, c'était beau pour les films à l'eau de rose, nous étions bien loin de cette image parfaite. Nous, nous étions endommagées, détruites, ravagées. Je finis par passer ma main dans les cheveux. Grand-mère, elle m'a parlé de.... tu-sais-qui... enfin.... lui quoi. Je détournais le regard un instant. Mon père. J'ignorais tout de cet homme, je n'avais vu qu'une image de lui. Cet homme était un tabou à lui seul. Et je n'avais jamais cherché à savoir qui il était, j'avais vécu sans et... je vivrai très bien avec cette absence. T'as jamais eu envie de le retrouver ?

WASTING MY YOUNG YEARS

See my dreams all die

Elle tourne le verre entre ses doigts, contemple avec nécessité le liquide ambré qui y ondule doucement. Boire ou ne pas boire, telle est la grande question qui s'agite dans sa petite caboche. Elle ne veut pas être de nouveau cette mère dépendante et merdique qui ne sait que s'anesthésier sous quelques vapeurs alcoolisées. Cela étant, Diane est forcée de constater que rien a véritablement changé depuis cette époque. Elle ne sait qu'annihiler la réalité à coup de gorgées avides et destructrices. Soudain, la rétrospective de son existence lui semble bien triste. Alors, elle repose péniblement le godet, comme si cela lui demandait un effort surhumain, puis détourne ses yeux honteux. Elle se concentre tant bien que mal sur une jeune femme, au loin, qui peine à tenir encore sur ses chevilles flageolantes Le rimmel à couler le long de ses joues pâles et, son état déplorable la renvoie des années en arrière, lorsqu'elle se trouvait à sa place, et que le barman s'empressait d'appeler Maya. Et, à chaque sa sœur venait, droite comme un i, le regard à la fois dur et triste. Elle complétait les sommes qu'elle ne pouvait plus payer puis, silencieusement, agrippait son bras pour l'extirper de ces bars miteux qui sentaient la sueur et la pisse. Elle la jetait dans la voiture, balayait d'un revers les quelques larmes sur ses joues, avant de regagner le domicile familial. Elle prenait soin de ne pas réveiller Artemis, ni leur mère, et la bordait, comme une louve le ferait avec ses petits. Diane n'ose pas compter le nombre de soirs où cela se déroula de la sorte. Il y en eut trop pour qu'elle se souvienne de chaque fois. Puis, la mort l'a fauché. Et Maya ne l'a finalement plus jamais fais. Un instant, elle songe à demander ce qu'est advenue de cette dernière. Elle l'imagine mariée, mère et sûrement heureuse. Elle l'espère. Alors elle ne dit rien. Elle préfère garder cette image, même si cela ne doit être qu'une illusion de plus. En se détruisant, la Sidh a anéanti tout le monde. Elle le sait. Et cette idée la dévore tel un parasite. Il lui suffit de poser les yeux sur Artemis pour le voir. Elle a cette lueur douloureuse dans le regard, cette étincelle qui ne luira plus jamais comme les autres. Diane soupire amèrement. Les choses n'auraient pas dû se dérouler ainsi. Et, aujourd'hui, elles devraient se trouver auprès de sa fille, dans une maison digne des magasines, avec cet homme qu'elle a aimé plus que de raisons. Mais ce parfait tableau n'est qu'un leurre, qu'une chimère qu'ils ne connaîtront jamais.

Diane n'insiste pas malgré son sourcil arqué qui indique clairement le contraire. Elle devrait lui demander davantage, la questionner sur cette femme qui est venue la trouver ainsi, sans ne rien exiger en retour. Mais, elle se contente d'écraser distraitement son mégot dans le cendrier. De toute évidence, Artemis n'est pas très loquace en ce qui la concerne. Si cette familiarité lui arrache un frêle rictus, elle aimerait, en revanche, qu'elle lui parle davantage. Après toutes ces années, elle doit probablement avoir un paquet d’anecdotes à lui conter. Et elle se fustige de ne pas être capable de l'interroger sur son quotidien depuis son départ. Mais, secrètement, elle craint de n'avoir été qu'un énorme point noir dans tout ceci. Alors, elle se renfrogne, s'enferme dans cet éternel mutisme qui n'a finalement pas évolué. Elle n'a jamais su s'exalter. Et, même si les mots viennent souvent, ils ne daignent que très rarement s'extirper de sa bouche close. Il n'y a peut-être qu'avec 'Mina que la chose est plus simple. Bien qu'elle ne fait que parler pour ne rien la plupart du temps. Elle plonge l’extrémité de son index dans le whisky, joue brièvement avec les glaçons qui se diluent lentement.
- Elle est... patiente. Et... de bons... conseils.
Gifle mentale. Mais elle n'est pas capable d'en formuler davantage. Pourtant, elle a une ribambelle de beaux adjectifs à attribuer à cette petite rousse. Elle hausse mollement les épaules, un peu gauche, puis ancre un regard pudique dans le sien.
- Elle m'a beaucoup aidé, conclut-elle néanmoins.

Elle manque de s'excuser à nouveau. C'est un réflexe quasi-instinctif. Et, c'est ridicule. Mais que peut-elle dire d'autre ? Il n'y a que cela qui lui vient. Des excuses. Comme si cela pouvait changer quoi que ce soit à leur affaire. Diane passe une main sur son visage dans un profond soupire. La confrontation est bien plus difficile qu'elle ne l'aurait cru. Se retrouver face à Artemis est, en quelque sorte, se retrouver face à ses innombrables erreurs. Et cela lui fait l'effet d'une violente claque en pleine figure. Elle n'était pas prête. L'aurait-elle simplement été plus tard ? Rien est moins sûr. L'oxygène lui manque. Elle regarde le minois juvénile de sa fille, visiblement interloquée par cette déchirante déclaration. Peut-être qu'elle devrait boire, finalement. D'ailleurs, ses ongles tintent contre le verre lorsqu'elle le saisit à nouveau. Elle le porte à ses lèvres pâles et, d'une traite également, ingurgite le contenu, non sans grimacer sous l'amertume qui caresse présentement sa trachée.
- Je... je t'aimais aussi même si... je t'aimais..., souffle-t-elle, tu es ma fille. Et... je ne cesserai jamais de... de t'aimer.
Sa tête lui tourne. Elle a envie de vomir, de pleurer. Elle ne sait plus. D'un autre verre, peut-être ? Au vu du sujet qui s'annonce c'est la totalité d'une bouteille dont elle aurait besoin. Faolan. Elle s'humecte nerveusement les lèvres. De toute évidence, cet homme reste un souvenir particulièrement délicat. Non pas parce qu'elle éprouve un quelconque manque, mais parce qu'il lui rappelle, désormais, ce qu'elle est devenue par sa faute. Elle se racla la gorge et agite la tête.
- Non.
La réponse est froide, limite tranchante. Le ton est d'ailleurs bien plus sec qu'elle ne l'aurait souhaité. Et, immédiatement, elle s'en veut. Elle inspire donc profondément, tente un sourire chaleureux à son attention.
- Mais si tu... veux savoir quoi que ce soit sur lui... j'essaierai de répondre. Dans la mesure du possible.
Elle se mord l'intérieur de la joue. C'est plus fort qu'elle, la curiosité la pousse à demander d'une voix peu assurée:
- Comment... comment va Maya ? Je veux dire... qu'est-ce qu'elle est devenue après... tout ce temps ?

Je suis arrivé(e) le : 21/12/2015

LITTLE GIRL, LITTLE GIRL, DON'T LIE TO ME

Tel me where did you sleep last night ?
In the pines, in the pines, where the sun never shines.

Sonja. Oh Sonja. La simple pensée de la banshee pouvait suffire à me faire monter le rouge aux joues. Elle me rappelait tant la vie que j'avais mené il n'y avait pas si longtemps que ça. Nous avions partagé une relation particulièrement intime.... plus intime que intime.... Et bordel pour un cadavre, je pouvais assurer que Sonja était loin d'être glacée comme la mort. Elle était même chaude comme la braise. Il fallait dire qu'il n'y avait pas si longtemps, mon seul but était de cumuler les relations au lit dans le but de fuir les sentiments que j'éprouvais pour une autre personne. Pendant bien longtemps j'avais fuit tout ce qui pouvait ressembler de près ou de loin à un embryon de relation amoureuse. A cette époque, l'image de ma mère qui s'était laissée dépérir à cause de sa relation avec mon géniteur m'avait hanté. Je ne voulais pas devenir comme elle. Pourtant je n'avais pas pu fuir longtemps mes sentiments que j'éprouvais pour mon meilleur ami. J'avais fini part surmonter cette peur... Mes défenses étaient tombées et pour le moment c'était une décision que je ne regrettais en rien. Visiblement Sonja avait avait aidé ma mère et lui avait procuré de bons conseils. Cela ne m'étonnait même pas. Il fallait dire que Sonja avait toujours été profondément bienveillante. Après tout, c'était elle qui avait ressenti toute ma détresse après la mort de ma grand-mère. C'était encore elle qui m'avait aidé à retrouvé forme humaine en me confrontant à mes propre émotions. Elle m'a sauvé la vie, finis-je par dire simplement. Sans Sonja, je serai en train de gambader à quatre pattes dans la foret, coincée sous ma forme animale pour toujours, comme se fut le cas de certains membres de mon espèce.

Je regardais ma mère. Je devais avouer que ces excuses commençaient franchement à me gaver. De toute manière ça ne servait à rien de faire l'épanchement de ses regrets, ça ne changerai rien à ce qu'il s'était passé. Rien ne changerai les dix années de ma vie. Ça n'avait pas été l'enfer, mais ça n'avait pas été le paradis non plus. J'avais vécu, survécu, tenté des faire avec les séquelles des névroses de ma génitrice qui semblaient s'être tatoués dans mon épiderme. Certes, Diane était bien loin des mères qu'on voyait dans les spots de pub, mais c'était quand même ma mère. Après tout ce que j'avais vu d'elle, tout ce que j'avais subi, je n'arrivais pas à la détester. J'avais toujours vu ma mère avec mes yeux de gamine, je ne voyais en elle que le positif. Je l'avais aimé, je l'aimais, et je l'aimerai pour ma longue vie de berserker. C'était trop dur à comprendre ? Je finis par boire mon verre d'une traite. Au diable les bonnes manières. Puis alors, sa déclaration me coupa le souffle. Elle venait de m'exprimer son amour. Mon cœur se serra dans ma poitrine. Dix années que je n'avais pas entendu ces mots-là. Grand-mère et tante Maya m'avait répété que ma mère m'aimait, mais ce n'était pas pareil. C'était aussi douloureux que c'était agréable, voilà qui était bien étrange.

Puis le sujet épineux tomba sur le tapis. Mon père. Celui dont je ne connaissais même pas le prénom. La seule chose que je savais de cet homme c'est que c'était un loup, un grand loup noir. Le fameux grand méchant loup. Je me demandais si elle avait déjà eu envie de le voir. Ne serait-ce que... je sais pas se venger ? Ou un truc comme ça ? J'en savais rien moi, au final je ne savais que peu de choses. Je savais que c'était un sombre connard qui avait brisé le cœur de ma mère, c'était le résumé qu'avait offert ma grand-mère. A cette époque j'avais compris que ma mamie ne l'aimait pas du tout. Je n'en savais pas plus. La réponse de Diane fut sans appel. Elle fut tellement sèche qu'elle produisit un frisson qui remonta tout le long de ma colonne vertébral. Ma mère finit par se raviser et prendre un ton plus... chaleureux ? Ou du moins elle essayait. Non.... j'veux rien savoir. Je me fiche de le retrouver ou de savoir qui il est. J'ai bien fait sans lui jusque là. J'vois pas pourquoi ça changerai. Je haussais les épaules. Je n'avais jamais eu besoin d'un père. Je n'avais pas dit ça avec animosité, c'était un fait. Un père aux abonnés absent, ce n'était pas si pire que ça. C'était devenu une norme pour moi... pas de mère, pas de père. Juste ma grand-mère et ma tante. Ma norme était loin d'être normale pourtant. D'ailleurs en parlant de ma tante, maman me demanda ce qu'il était advenu de Maya, de sa voix peu assurée, presque tremblante. Instantanément un grand sourire se traça sur mes lèvres. Évoquer Maya était toujours agréable pour moi. Elle avait toujours été la tante cool, de mon point de vue en tout cas. Et elle m'avait tellement aidé suite au décès de mamie. Preuve étant j'avais passé Noël avec elle et sa petite famille. Elle était toujours là en cas de coup dure. Maya ? Une vrai maman ours ! Je ris légèrement en imaginant Maya en maman ours... et quand j'y pensais c'était vraiment le cas. Une mère qui chouchoutait sa famille et qui montrait les crocs dès que quelqu'un osait les approcher. Elle s'est marié et elle a deux superbes enfants. Deux garçons. Tu te rends comptes, des garçons ? Je souris légèrement en voyant les deux enfants qui était plus jeunes que moi. Je les adorais mais bon sang, ils étaient pleins d'énergie ! Même moi ils arrivaient à me fatiguer parfois. On pourrait lui rendre visite si tu veux, elle habite un peu en dehors de la ville avec sa petite famille. Ça te dirait ?

WASTING MY YOUNG YEARS

See my dreams all die

Elle ne devrait pas être ici. Pourtant, sa place se voudrait exactement là, à cet endroit, face à cette enfant qu'elle n'a pas vu grandir. Mais, elle n'a jamais été mère. Certes, elle l'a porté en son sein durant de longs mois. Seulement, elle ne l'avait pas aimé immédiatement. Ce petit être qui lui poussait sous le nombril n'était qu'un leurre, qu'un mensonge auquel elle ne voulait pas donner vie. Mais il était trop tard pour arracher ce petit pois à ses entrailles. Alors, elle l'avait laissé germer, comme l'on observe le nature se déployer sans y prendre part. Souvent, elle avait regardé ce ventre rebondi dans le miroir avec la douloureuse impression d'être habitée, seulement squattée par un parasite qu'elle n'avait définitivement pas désiré. Longtemps, elle avait prié le ciel pour qu'un incident ne survienne et puis, elle s'y était habituée. Elle avait apprivoisé cet être qui, finalement, était également une part d'elle-même. Elle avait dompté les nausées qui lui venaient, chaque fois qu'elle songeait à ce père qu'elle ne connaîtrait pas, à cet époux qu'elle ne chérirait jamais. Il y avait eu Maya, bien évidemment, et sa mère pour la soutenir lorsqu'elle ne se préoccupait plus de cette existence à la fois destructrice et fragile qui s'éveillait en elle. Et le jour de sa naissance, Diane n'avait pas voulu la voir tout de suite. Peut-être aurait-elle souhaité que l'on la lui prenne. Sans doute aurait-elle aimé que sa sœur ne prononce les mots qu'elle n'osait pas formuler. Les cris avaient retenti au loin, lui avaient pris la gorge et, Diane avait alors froncé les sourcils, sceptique, puis curieuse ensuite. La petite avait été déposée dans ses bras, ses prunelles hagardes s'étaient déposées sur la fillette et là, elle avait su: c'était sa fille. Cela s'était immiscé en elle comme une évidence, une destinée à laquelle elle ne pouvait, à laquelle elle ne voulait échapper. Et elle l'avait aimé; sans apparats ni artifices. Elle s'était simplement laissée aller à ce nourrisson; le cœur en miette mais vivant. Cela étant, les années se sont défilées et, avec elles, toutes ces choses qu'elles vivront plus. Alors, qu'est-elle désormais, si ce n'est le balbutiement d'une chimère ?

Artemis ne veut pas en entendre davantage au sujet de son géniteur. Diane ne dit rien, hoche simplement la tête mais, cela la réconforte malgré tout. Bien entendu, elle lui aurait conté leur rencontre, détaillé les traits juvéniles de son père, jusqu'au grain de sa voix. Elle l'aurait fais pour elle, parce qu'elle le lui doit bien. Seulement, Faolan reste ce point noir, cette tache ensanglantée dans le tableau de son existence. Et, Diane ne parvient toujours pas à cohabiter avec. Alors, elle annihile tout; le jour et jour sous des litres de liqueur. Mais les paradis artificiels ne sont que parjures et, s'étiolent inexorablement. Son index suit distraitement la courbe du verre, alors qu'elle se perd en instants fugaces et lointains. Elle se rappelle, bien évidemment, du premier jour où elle avait croisé ce beau-parleur. Elle avait été si naïve. Puis elle s'était montrée si faible par la suite. Diane inspire péniblement. Elle se doit d'en dire quelque chose, même si cela n'est que futile banalité. Artemis ne pourra pas toujours faire comme si son père n'était qu'une illusion. Et, viendra forcément le moment où, elle voudra savoir. Alors, Diane papillonne des cils, les traits plus tirés encore, tandis qu'elle articule douloureusement:
- Ton père... c'était un bel homme. Il était..., sa voix se brise un instant, tu as sa bouche.
Un triste sourire étire ses lèvres. Elle n'est pas capable d'en dire davantage. Diane est navrée encore, mais elle ne le dit pas. Elle porte simplement le verre à ses lèvres et, happe les quelques dernières gouttes qui y restent. Faolan. La douleur la souffle toujours. Partira-t-elle seulement un jour ? Rien est moins sûr. Il s'agit, désormais, d'une faille qu'elle portera comme un éternel stigmate.

Maya se porte bien. Sa sœur poursuit sa vie. Les nouvelles sont bonnes et délicieuses. Mais elle lui broie l'estomac. Elle n'a pas été présente lors de sa première grossesse, comme elle n'a pas assisté à son mariage. Quelques larmes brillent au coin de ses cils, quelques gouttes douloureusement heureuses. Diane ne l'interrompt pas tout au long de son discours. Elle en savoure chaque mots, chaque syllabes, laissant à son imagination le soin de faire le reste. Maya est probablement une mère exemplaire. Pour cela, il lui suffit de songer à ces nombreuses fois où, elle avait veillé sur elle comme telle. Elle sourit sincèrement, de ce rictus tendre des familles, puis acquiesce doucement.
- Ça... lui va tellement bien d'être entourée de garçons. Elle... elle doit être... une mère exceptionnelle.
Un sanglot lui coupe le souffle. Sa sœur avait toujours été ce pilier indéfectible auquel elle se raccrochait lorsque la chute menaçait. Elle avait été, quelques fois, l'équivalent d'une mère, plus que d'une simple sœur. Elle se redresse un peu, essayant vainement de récupérer un brin de constance.
- Je suis... tellement heureuse pour elle.
Revoir Maya; elle l'a envisagé plus d'une fois, oui. Mais, maintenant qu'Artemis étale enfin le sujet, Diane n'est plus certaine que cela soit une très bonne idée. Qu'auraient-elles à se dire ? Maya avait terriblement soufferts de son état à l'époque et, elle n'ose imaginer ce qu'elle avait enduré, elle aussi, après sa mort.
- Je ne... suis pas sûre que ça soit une... très bonne idée. J'en serai heureuse mais... je lui ai fais énormément de mal et... elle a sa vie, désormais. Elle n'a... probablement pas besoin de voir resurgir un fantôme du passé.
Mais c'est la peur qui la fait parler. Elle n'est pas encore prête à percevoir toute la peine qu'elle a pu lui causer, ni même à entendre tout ce qu'elle doit garder sur le cœur après toutes ces années.
- Et... mamie ? Comment...
Diane baisse les yeux. C'est la honte, cette fois, qui l'assaille brutalement. Sa mère...

Je suis arrivé(e) le : 21/12/2015

LITTLE GIRL, LITTLE GIRL, DON'T LIE TO ME

Tel me where did you sleep last night ?
In the pines, in the pines, where the sun never shines.

Mon père ? Je me foutais bien de mon père. Je ne l'avais jamais connu. Je ne connaissais même pas son prénom. Depuis que j'étais gosse, j'avais grandi avec cette sorte de tabou. On ne parlait pas de mon géniteur. On ne parlait pas de lui. C'était celui dont on n'avait pas le droit de prononcer le nom. Ouais, un peu comme Voldermort quoi. J'avais presque grandi en me disant que mon père était peut-être une sorte de Voldemort berserker. Ouais, c'était bien con, je le savais très bien. Pourtant... pourtant d'un certaine manière c'était le cas. Je ne m'étais jamais posé de question sur cet homme. Je ne connaissais au final que très peu de choses sur lui. Je pouvais déduire rapidement que c'était un berserker, forcément sinon je ne l'aurais pas été moi-même. Et je savais que c'était... un loup. Et c'était déjà pas mal en fait. J'avais fini aussi par trouver dans un carton une vieille photo de lui. Une photo de lui et de ma mère. C'était tout. Mon père était un étranger donc je ne connaissais pas le nom. Mais ce n'était en rien triste. C'était comme ça. Je n'étais pas à plaindre dans le fond. Je cligne difficilement des yeux quand Diane commence pourtant à en parler. Bel homme ? Euh....ok. Je ne pus contenir une grimace quand elle me dit que j'avais hérité de sa bouche. Ouais, je n'avais pas vraiment envie de ressembler à cet homme. C'était pas contre lui... mais voilà. Du peu que je savais de lui et ce qu'il avait fait à ma mère.... je n'avais pas envie de lui ressembler. Ouais, je ne voulais pas être ma mère, mais je ne voulais pas être mon père non plus.... c'était d'un logique implacable. Oh...ok. ouais je ne savais pas trop quoi je devais avouer. Mais cette question me remonta dans ma tête. Je me demandais juste.... simple curiosité. Je m'arrêtais quelques secondes et me mordillais la lèvre inférieure. Mon doigt traçait nerveusement des arabesques sur le comptoir du bar. C'est.... quoi son prénom ?

Maya. Je souris en pensant à ma tante et à ses petits monstres. Deux monstres qui me sautaient littéralement dessus dès que je passais les voir. Ils n'avaient pas encore dix ans, et n'avais pas encore dévoilés leurs totems. Mais s'ils continuaient comme ça ils allaient hériter d'animaux hyper-actifs ça s'était sûr et certains ! Maya était formidable, elle vivait avec son cher et tendre, celui avec qui elle avait connu l'amour et la fameuse reconnaissance. Une chance m'avait-elle dit, car l'un ne venait pas forcément avec l'autre. Ils avaient une belle famille tous ensemble. Ma tante avait été un pilier pour moi après de le décès de ma grand-mère. Elle m’avait incroyablement soutenu après son décès. M'aidant à surmonter les conflits avec mon totem. Sans la famille je n'en serai peut-être pas où j'en étais actuellement. Je souris à la remarque de ma mère. C'était vrai, être entourée de mecs ça allait tellement bien à Maya. Et je pouvais assurer qu'elle était parfaitement comblée avec son équipe de mecs. Je posais ma main sur celle de ma mère quand elle laissa échapper un sanglot. Elle est géniale ouais, répondis-je avec un faible sourire. Et encore, c'était faible. Pourtant malgré tout son bonheur pour Maya, elle ne voulait pas la voir. Je manquais soupirer. Je retirai ma main de la sienne pour faire un signe au barman pour commander un autre verre. J'en profitais pour ressortir une cigarette de mon paquet de la rallumer. Tu fais ce que tu veux après tout, dis-je en sortant mon briquet.

Puis la question fatidique. Je me figeais quand Diane parla de sa mère. Ma grand-mère. Je pris une longue bouffée sur ma cigarette. Comment elle.... la suite venait naturellement. Je posais le plat de la paume de ma main sur mon front. Grand-mère. Quand j'y pensais c'était tellement.... récent. Elle était morte l'année dernière. Novembre. Ce n'était si loin que ça. Et bien sûr, j'étais encore très affectée par cette perte. J'expirai la fumée de la cigarette et posais mes prunelles sur le verre qui venait à peine d'arriver. Elle... je... je m'arrêtai quelques secondes cherchant les mots juste. Comment présenter la chose. Mort naturelle, finis-je par lâcher. Comment le dire autrement ? Ma grand-mère était morte naturellement. Pas de suicide, pas d'homicide. Une mort tranquille, usée par la vie et les épreuves. Elle s'était en allé naturellement. Je passai une main sur mon visage. J'aurai.... pu être plus facile avec elle. Je pris mon verre et observais le liquide ambré. Ouais, je n'avais pas été la petite-fille la plus facile du monde. Entre mes crises de colères avec mon coyote et... mon adolescence, je n'avais pas été très facile avec elle. J'suis tellement nulle, finis-je par lécher avec une pointe de dégoût dans ma voix. Je finis par être secouée d'un sanglot. Elle me manquait. Elle me manquait tellement. Si seulement elle m'avait vu comme ça à me lamenter, elle m'aurait sûrement engueuler. Comme elle m'aurait sûrement engueuler pour sortir avec un alchimiste. Ma grand-mère me manquait cruellement.

WASTING MY YOUNG YEARS

See my dreams all die

Faolan. Elle ne s'en est jamais véritablement remise. Il reste le gros point noir de son existence, celui qui a régis ses derniers jours et sa mort. Elle n'aime toujours pas parler de lui. Elle n'aime pas songer à ce qu'ils ont vécu par le passé. Parfois, elle en arrive même à se convaincre que sa fille ne vient pas de lui. Maintenant qu'elle est destinée à errer éternellement sur terre, il ne lui reste plus que le déni pour ne pas définitivement perdre l'esprit. Alors, elle fait comme si Faolan n'avait jamais existé, comme s'il n'était que le fruit d'un mauvais rêve. Cependant, force est de constater que cela ne fonctionne que trop peu de fois. Et pour preuve, elle regarde Artemis et, tout ce qu'elle voit, c'est lui. Si la ressemblance mère et fille reste frappante, les similitudes qu'elle possède avec son géniteur, elles, sont déroutantes. Mais, elle n'en dirait pas plus. La jeune fille ne semble pas encline à en savoir davantage. Sans doute que sa grand-mère l'avait déjà briefé sur lui. De toute évidence, elle ne l'avait jamais réellement porté dans son cœur. Et, après qu'il fut parti, son animosité fut bien pire. Alors, Diane a bien une petite idée du topo que cette dernière avait pu servir à sa fille. Dans un soupire à la fois nostalgique et amusé, la Sidh secoue sa petite tête brune. Sa mère n'avait eu que très rarement la langue dans sa poche. Elle pose doucement sa main sur celle d'Artemis, dans un demi-sourire réconfortant. Certes, le sujet reste douloureux à de nombreux égards mais, elle ne se fermerait plus à sa fille là-dessus. Elle a le droit de savoir si elle le souhaite. Alors, lorsqu'elle lui demande le nom de ce dernier, Diane ne peut s'empêcher d'un timbre presque rêveur:
- Faolan.
Elle l'avait aimé plus que de raison. Et, même si beaucoup de cicatrices encore purulentes sont à prendre en compte aujourd'hui, Faolan reste le premier amour qu'elle eut.
- Tu as le droit de savoir, Artemis. Je... j'imagine que mamie a dû te... faire un topo. Mais... ne t'excuse jamais de me demander quoi que ce soit en ce qui concerne ton... père. D'accord ?

La nonchalance d'Artemis la déstabilise un instant. Elle fait ce qu'elle veut. Elle n'est surtout pas prête pour cela. Pourtant, Dieu seul sait à quel point Maya lui manque. Il ne lui reste plus qu'elle désormais. Mais, que pourraient-elles bien se dire après toutes ces années ? Qui sait comment sa sœur avait vécu sa disparition ? Un instant, elle songe à le demander à sa fille mais, elle n'est pas sûre d'en assumer les réponses. Alors, elle baisse les yeux vers son verre vide, tapote nerveusement ses doigts contre lui. Les choses sont bien trop délicates pour qu'elle puisse débarquer ainsi sans préavis. Au moins, Maya a refais sa vie et ça, c'est une précieuse certitude qui réchauffe le cœur mort de la Sidh. Elle inspire profondément, puis ancre de nouveau ses prunelles encore légèrement humides dans celles d'Artemis.
- Je ne suis pas... encore prête pour ça. Pour l'instant. Mais... quand je le serai, nous irons la voir ensemble.
Et elle lui adresse un sourire peu assuré, mais sincère. De toute évidence, elle ne tiendrait pas une année de plus sans retrouver sa cadette.
- Mais... préviens la, quand même. Je n'aimerais pas qu'elle nous fasse une syncope en me voyant.
Elle rit doucettement, un peu nerveuse et amusée par cette demande implicite. Disons, surtout, que cela permettrait à tout le monde de voir si Maya se sent apte à la revoir. Diane l'espère silencieusement. Elle a encore besoin de sa sœur.

Diane ne cille pas beaucoup lorsque sa fille s'épanche au sujet de sa grand-mère. A dire vrai, l'émotion est tellement vive, qu'elle ne sait pas de quelle manière la gérer. Alors elle reste con, à contempler le visage d'Artemis, sans broncher. Sa mère. Elle était morte sans savoir à quel point elle l'aimait. Elle était morte sans savoir quelle mère exceptionnelle elle fut pour elle. Diane ferme les paupières. La honte et la culpabilité lui lacèrent l'abdomen et la trachée. Elle l'a abandonné lâchement, elle aussi, alors qu'elle avait tout fait pour la remettre sur pieds, quitte à s'en accabler toujours plus. Elle s'était tuée à la tache. Mais, elle n'avait su que porter le canon à sa tempe, sans un seul regard par dessus son épaule. Ce n'est pas aux parents d'enterrer leurs enfants et, pourtant, sa mère n'avait pas eu d'autres choix. Elle se mord la lèvre pour ne pas hurler toute l'amertume qu'elle se porte, puis secoue à nouveau péniblement la tête.
- Non, souffle-t-elle.
Elle pose doucement ses deux mains sur les poignets de la jeune fille.
- Ta grand-mère t'aimait... plus que quiconque. Elle... savait que ce n'était pas facile pour toi et je... suis sûre, non, je sais qu'elle ne t'a jamais tenu rigueur de ce que tu as pu faire.
Ses doigts se glissent dans sa chevelure pour dégager tendrement son visage, alors qu'elle la détaille quelques secondes dans un silence timide.
- Je ferai mieux d'y aller. Mais... tiens.
Elle farfouille dans son sac et, griffonne son numéro sur le dos d'un vieux ticket de caisse.
- Quand... enfin... si tu as envie que l'on se revoit...
Elle fuit, c'est une évidence. Mais c'en est trop pour une seule soirée.

Je suis arrivé(e) le : 21/12/2015

LITTLE GIRL, LITTLE GIRL, DON'T LIE TO ME

Tel me where did you sleep last night ?
In the pines, in the pines, where the sun never shines.

Faolan, avais-je répété tout bas comme une prière à moi-même. Ainsi je pouvais mettre un nom sur l'homme que j'avais vu en photo. Est-ce que j'avais envie de le revoir ? Non je n'avais pas plus envie de retrouver mon père qu'avant. Il resterai toujours à mes yeux ce père absent. Comment pouvais-je avoir un manque sur une personne que je n'avais jamais vu de ma vie ? Non c'était stupide. Après peut-être que je changerai d'avis, je n'en savais trop rien. Après tout, il n'y avait que les cons qui ne changeaient pas d'avis. Un jour peut-être que j'aurais envie de savoir qui il était. Je n'en savais trop rien. J'acquiesçai en silence quand elle me dit que je ne devais pas m'excuser de poser des questions sur lui. D'un coté je n'avais pas vraiment envie de remuer le couteau dans la plaie à cause de curiosité. Grand-mère m'avait tant de fois dit que c'était à cause de cet homme que ma mère était morte. Faolan, mon père qui était parti sans rien dire, sans se retourner, malgré les sentiments de ma mère. Pendant longtemps, cette histoire me laissa des traces. Ayant chroniquement peur de répéter les erreurs de ma mère, je m'étais interdit de ressentir le moindre sentiment amoureux envers quiconque. De manière globale, je m'étais même interdit de m'attacher trop facilement aux gens que je rencontrais histoire de minimiser au maximum les risques. Mais preuve était que j'avais franchement raté mon coup, vu que j'étais finalement tombée dans le piège qu'était la relation amoureuse. Et avec un plaisir énorme. Ma relation avec mon alchimiste était bien ancrée, mais même si celui m'avait promis de ne pas m'abandonner, j'avais toujours cette peur qui restait coincée au fond de mes entrailles. Cette fichue malédiction de merde. Peut-être aurais-je du parler à ma mère de Flynn... je lui en parlerai, mais pas maintenant.

Le sujet de Maya sur le tapis, et ma mère qui ne voulait pas la voir. M'enfin elle faisait bien ce qu'elle voulait, je supposais. Je savais bien que Maya serait surtout très heureuse de pouvoir la revoir. Lui présenter son mari et surtout lui montrer ses deux superbes fistons. Même moi, j'étais gaga de mes deux adorables cousins. Ces deux-là avaient un don pour redonner la pèche et le moral à n'importe qui. Puis ma mère me confia qu'elle n'était pas prête pour faire face à sa cadette. Oh. Je voyais pourquoi elle refusait de la voir. Je souris légèrement quand elle précisa que quand elle se sentirai prête à revoir sa sœur, nous irions ensemble. Ouais, ça serait super. Ça me ferait vraiment plaisir. Il y avait beaucoup de sincérité dans les paroles de Diane, je le sentais bien. C'était touchant. J'eus un rire quand elle me demanda de prévenir tout de même Maya pour qu'elle n'ait pas une syncope. Tu as raison, ou pire, mettre l'ours en colère, j'eus une grimace exagérée avant de me remettre à rire franchement. L'ours le totem de Maya, celui qui lui avait valut un tas de doux surnoms dont notamment: maman ours, mais entre nous celui-ci était loin d'être volé ! Ce n'était pas féminin mais ça convenait tellement à la personnalité de ma tante.

Puis arriva le temps de parler de ma grand-mère, la mère de ma mère, Theresa. Ce sujet là me rendait incroyablement sensible. La perte était encore trop récente. Avoir perdu ma grand-mère fut la chose la plus horrible que j'ai eu à vivre. L'épreuve fut tellement dure à encaisser pour moi, qu'en fusionnant avec mon coyote, celui-ci avait pris très rapidement le dessus sur moi. Ma propre personnalité s'étant rapidement mis en PLS pour laisser celle du coyote diriger. Ainsi j'étais resté un mois à gambader dans la foret. Forcément je ne pouvais pas cacher bien longtemps mes émotions. Je m'étais sentie misérable. Je n'avais pas vraiment été facile avec elle, bien au contraire. Je lui avais fait faire du soucis. Je n'avais pas été une petite-fille modèle. Entre mes sorties, l'alcool, les coucheries à droite à gauche.... ouais. Je ne pus réprimer un sanglot. Mais celui vint à mourir quand ma mère me sortit un discours rassurant. Je la regardais silencieusement. M'en avait-elle tenu rigueur ? Probablement pas. Mais souvent, elle m'engueulait quand je revenais à point d'heure à la maison. Ou quand on l'appelait en catastrophe parce que je m'étais enfermé dans les WC à la suite d'une métamorphose en furie non-maitrisée. Je souris légèrement alors qu'elle tripota mes cheveux. Merci, murmurai-je. Puis sans plus elle annonça qu'elle devait partir. Oui, tu as raison, il se fait tard.... ou tôt. Je secouai la tête chassant mes idées tristes. Je pris le bout de papier et lu son numéro de téléphone. Bien sur que je veux te revoir. Je souris légèrement, dix années sans voir ma mère et une soirée ne suffisait pas à résumer tout ce que je voulais lui raconter. Je voulais lui parler de Flynn, lui parler d'Oreste et peut-être que Sonja. Je venais de la retrouver, je n'étais pas la lâcher. Je ne voulais pas qu'elle parte encore une fois. Attends ! Je m'approchais alors doucement de ma mère et sans crier gare mes bras s'enroulèrent autour d'elle. Cette étreinte franche qui m'avait tant manqué. Je fermais un instant les yeux profitant de ce contact dont j'avais été privé pendant de looongues années. Je t'aime maman, glissais-je tout bas comme un secret entre nous. Puis je finis par m'éloigner, histoire de na pas faire étouffer ma mère.... quoiqu'elle était déjà morte. MDLOL ! On se revoit très vite, promis ? Je souris franchement avant sortir de quoi payer de ma besace. J'en profitais aussi pour ranger soigneusement le papier avec le numéro de téléphone dans mon porte-feuille. Je posais l'argent sur le comptoir sans faire attention avant de faire un petit signe de la main à ma mère. Je me retournais et filais dans la foule, me fondant rapidement dans la masse informe de la populace. Cette soirée était définitivement.... étrange.

Wasting my young years + Ft. Artemis

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