Nom : Callahan ; comme un leitmotiv, un éternel souvenir de ce que je fus autrefois. Si nous ne connaissons pas les mondes que nous foulerons à l'avenir, nous savons, en revanche, d'où nous venons. Ce n'est pas un fardeau mais, au contraire, le flambeau de ce que je suis aujourd'hui. Muñoz, lui, représente le chemin que j'emprunte désormais jour après jour, fièrement, sans sourciller. Il est ce à quoi j'aspire au plus profond de mes espérances. Prénom(s) : Jezabel. Douce hérésie lorsque l'on a vent de cette reine impie qui régna en ce nom. Mais, si les âmes ont une quelconque chance de rédemption, les mots en ont, eux aussi, le droit. Jezabel ; pour une nouvelle ère, un nouveau souvenir qui viendra effacer l'ancien et panser les plaies de l'Histoire. Âge : Trente-six années d'apparats. Âge d'apparence : Trente-sept ans, dont une année mortifère. Date de naissance : 29 novembre 1978. Nationalité : Canadienne. Origine(s) : Des origines Irlandaises que j'affectionne particulièrement. Métier : Chirurgienne cardiaque. Métier pour lequel je vis mais qui, présentement, me torture plus qu'il ne m'apaise. Niveau social : Plus que aisé. Statut marital : Les contraires s'attirent, parait-il. Eros et moi illustrons à la perfection ce diction plus que désuet, puisque nous sommes désormais mariés depuis six ans. Orientation sexuelle : Hétérosexuelle, jusqu'à preuve du contraire. Avatar: La splendide, sublime, magnifique, démentielle et j'en passe ; Jessica Chastain. Crédits: Eden Memories. Personnage: Inventé. Petites curiosités Famille et proches - Mon enfance fut dictée par les aspirations pieuses d'un père et d'une mère austères. Mais, nous faisions uniquement dans l'apparat. Si devant la face du monde nous dévoilions le stéréotype de la gentille famille que l'on rencontre sur les cartes postales, nous étions, finalement, que mensonges et contrefaçons. Il suffisait de creuser un peu, d'ouvrir les placards sur les nombreuses bouteilles de mon géniteur, pour déchanter rapidement. Nous ne communiquions que très rarement ensemble. Tout n'était qu'une question d'apparence. Et, lorsque les volets se refermaient, lorsque l'obscurité recouvrait enfin nos leurres, nous n'étions que des étrangers que ni le sang, ni l'amour ne rassemblait. Cela étant, cette situation me convenait. Formatée depuis mes premiers cris, je faisais ce que l'on attendait de moi sans broncher. Puis, il y eut Eros ; cet être qui n'avait strictement aucun rapport avec ce que j'étais, ce que je m'apprêtais à devenir. Peut-être fut-ce pour cette raison qu'il dévasta chacune de mes convictions. Quoi qu'il en soit, je ne cherche plus à poser une quelconque explication sur ce qui me lie encore à lui. Il est mon seul point d'ancrage, le dernier brin de raison qu'il me reste. Besoins carnassiers - C'est une lutte perpétuelle, qui m'essouffle chaque jours un peu plus. Que suis-je ? Qui suis-je, désormais ? Je l'ignore. Mais, il y a cette appétence démesurée, cette faim dévorante qui me lacère les viscères. C'est une brûlure dans ma gorge, un nœud déchirant entre mes cotes. Je persiste, m'enlise à travers cette guerre que je sais pourtant perdue d'avance. Mais je refuse de n'être qu'un pantin de plus, articulé par quelques instincts primaires. Alors, souvent, je ferme les yeux, me voile la face comme si toute mon existence ne s'était pas détériorée. Je fais fi de ces voix qui me rappellent incessamment que je ne suis plus la même. Je m'immerge dans une dénégation destructrice. Position sur le conflit - Peu m'importe ceux et celles qui gravitent autour de moi. Nous sommes des millions, des milliards à ne pas s'assembler harmonieusement. Il suffit de s'attarder un court instant sur le commun des mortels pour le constater. Alors, quel intérêt devrais-je trouver à cette querelle ? Je n'étais, de toute évidence, pas destinée à y prendre part. Je ne devrais pas être ce que je suis aujourd'hui et, je ne me sens que très peu concernée par mes « semblables ». Points faibles - Ce que je redoute et m'affecte profondément n'est autre que cette seconde nature qui grouille entre mes tempes, entre mes reins, comme autant de petites bestioles ; perfides et despotiques. Il me suffit d'une émotion bien trop vive, d'une stupéfaction bien trop conséquente pour animer un brasier sans nom au cœur de ma cage-thoracique. C'est un véritable ouragan, une coulée de lave. Cela dévaste tout ; l'intérieur et l'autour. Puis, il y a Eros ; mon unique point d'amarrage. C'est une affliction parfois déliquescente, parfois délirante. Mais, il n'y a que lui pour donner ne serait-ce qu'un peu de sens à ma nouvelle existence. Il me ramène au sol, lorsque je me perds dans les méandres du vent. Que serai-je sans son ombre au dessus de ma couche ? Rien, assurément.

qualités
Ambitieuse
Attentive
Charismatique
Consciencieuse
Passionnée
Protectrice
Sensible
Tendre
défauts
Carnassière
Colérique
Compulsive
Dépendante
Impulsive
Obsessionnelle
Possessive


- Apparats -
Inconnue lambda :
- Elle est belle. C'est indéniable. Et ça prend les tripes, lorsque l'on s'y attarde un instant. J'ignore tout de cette femme. Je ne suis qu'une simple poussière de plus sur son chemin. Parfois, j'ai la sensation qu'elle me regarde, lorsqu'elle savoure les beaux jours, tout juste camouflée sous l'ombre du porche. Elle balaye la rue négligemment, sans s'attarder sur quiconque, ni quoi que ce soit, une tasse encore fumante entre les mains. Puis, ce que je suppose être son mari dépose ses mains sur ses épaules, embrasse le sommet de son crâne. Elle irradie. C'est une certitude. D'ici, ils ont tout du couple parfait, brillant de mille-et-un bonheurs. Malgré ses traits peu avenants, son regard souvent torturé par un indicible mal, tout semble se balayer en un battement de cil, lorsqu'elle se tourne enfin vers lui pour l'embrasser. Ils sont beaux. Ils sont jeunes. Et ils s'aiment. Pourtant, une fois qu'elle se retrouve de nouveau seule avec elle-même, une lueur carnassière semble reluire au sein de ses prunelles hagardes. Ses sourcils se froncent, sa lèvre se coince entre ses dents et, quelques fois, je crois percevoir le sang s'en échapper. Ses doigts s'agitent autour de la porcelaine. Elle perd de sa superbe lorsque son époux n'est plus là pour attiser la chaleur entre ses côtes, entre ses reins. Quel givre l'habite-t-elle dans ses instants d'errances ? Elle est hantée. Il suffit de l'observer, de la contempler lorsqu'elle redresse enfin les épaules, qu'elle appuie une main peu assurée contre la poutre. Le mug, lui, tremble. Et, elle s'empresse de regagner l'antre de sa demeure, le cœur battant sans aucun doute, submergée par une angoisse qu'elle ne parvient - visiblement - pas à réprimer.

- Profondeurs -
Un ami:
- Avec Jezabel, c'est tout ou rien. Elle ne connaît pas la demi-mesure. C'est une femme, me direz-vous. Mais, celle-ci est bien plus complexe, plus sinueuse. Un instant, elle semble d'une tendresse quasi-maternelle et, la seconde d'après, être prise d'une frénésie incontrôlable. Elle est déterminée, parfois bien trop bornée pour lui faire entendre raison. Et, le lendemain, ce n'est plus qu'une petite chose frêle, fragile, en proie à quelques démons qu'elle tente désespérément de refréner. Je crois, en vérité, qu'elle lutte principalement contre elle-même. Je le vois, quelques fois, lorsqu'elle se pense seule et qu'elle scinde son reflet, comme s'il s'agissait d'une confrontation silencieuse. Silencieuse, mais tumultueuse. De toute évidence, Jezabel ne sait que souffler le chaud et le froid. C'est un jeu qu'elle ne remarque même plus. Un jour, c'en est une. Le jour d'après, c'en est une autre. Elle oscille indéfiniment. Où se place-t-elle, finalement, dans l'univers qui l'entoure et l'enserre ? Nul le sait. Pas même elle. Mais, cela prend la gorge, lorsqu'elle s'arrête un instant, qu'elle pose ses grandes prunelles incandescentes sur vous. Et, vous ne savez jamais quelle déduction en tirer. Va-t-elle se jeter à votre carotide ou bien, au contraire, vous étreindre jusqu'à vous en couper le souffle ? Elle n'est pas véritablement mauvaise. Je crois, simplement, qu'elle n'est pas au clair avec elle-même. Peut-être a-t-elle quelques méfaits à se pardonner. Ou, peut-être tente-t-elle de réprimer quelques volontés déliquescentes. J'ai beau la connaître, j'ai moi-même du mal à me positionner. Et, je suis quasiment certain qu'il en est de même pour elle. Heureusement, il y a son mari. Et, souvent, je ne peux m'empêcher de songer qu'elle ne serait définitivement plus rien, s'il n'était pas là.

C'était un grand jour aujourd'hui. Jezabel était trop jeune, elle ne comprenait pas tout ce remue-ménage. Mais, c'était un grand jour; papa et maman ne cessaient de le répéter depuis la veille, comme s'il s'agissait là d'un vieux refrain. Assise sur le bord du lit, ses petits pieds battant la mesure d'une mélopée inexistante, elle suivait d'un œil intrigué les nombreux allers-venus de ses parents. Le temps manquait, visiblement, à ce grand jour qui l'ennuyait déjà. Il faisait beau en ce premier mai et, la petite aurait préféré gambader dans le jardin. Mais, son père ne voulait pas qu'elle risque de salir sa jolie robe d'un blanc presque aveuglant lorsqu'elle se trouvait face à la fenêtre qui laissait filtrer quelques rayons lumineux. Elle était apprêtée comme ces poupées de porcelaine que l'on croise derrière les vitrines des vieilles boutiques bondées de bibelots antiques et d'accessoires mystiques. Elle s'était longuement regardée dans le miroir lorsque sa mère avait tressé ses longs cheveux roux. Elle avait fais tourné le tulle, l'air critique et franchement peu convaincue par le goût vestimentaire de ses géniteurs. Mais, elle n'avait pas le choix. Dans cette famille, personne ne disait rien. Chacun avait son rôle et, suivait les instructions du script à la lettre, sans le moindre écart. Quel était le sien ? Jezabel n'était pas encore certaine de le savoir. Alors, elle obtempérait sans rechigner. Toute cette mascarade n'était finalement qu'un jeu. Il y avait l'envers du décor, les coulisses, leur réalité, celle dont personne n'avait connaissance. Il y avait les bouteilles que l'on dissimulait à la face du monde, et cette indifférence latente qui les caractérisait tant lorsqu'il n'y avait plus qu'eux. Jezabel, tu te rappelles de ce que je t'ai dis ? La petite prit quelques minutes pour observer les traits austères et crispés de sa créatrice. Elle ne savait pas sourire. Jezabel ne l'avait que très rarement vu détendu. A croire qu'elle n'était qu'un élastique sans cesse au bord de la rupture. Elle se pinça les lèvres en une petite moue enfantine, puis hocha promptement la tête. Oui. Je dis bonjour, je souris, et je ne parle que lorsque l'on m'y a autorisé. Cette réponse fut la bonne, car elle reçut une tape sur le haut de son crâne. A croire qu'elle n'était qu'un chiot à qui l'on donnait des ordres. Elle se balaya l'extérieur d'un regard envieux de son cloître, puis soupira le plus discrètement possible. La voix criarde de la marâtre beugla, au loin, quelques réprimandes que Jezabel ne comprit pas. Elle n'avait pas besoin d'en déceler tous les mots pour savoir qu'elle rappelait, une fois de plus, à son époux de ranger les derniers vestiges de ses vices. Il avait beau boire, la fillette appréciait ce dernier pour ce qu'il était: un gaillard un peu bourru mais très attentionné. Et, parfois, il lui arrivait de garder une ou deux sucreries pour elle.  Il était gentil la plupart du temps, sauf lorsqu'il se laissait aller à la bibine. Mais Jezabel ne s'en était jamais formalisée. Comme sa mère, elle faisait comme si cela ne se produisait pas sous leur toit, comme si cela n'arrivait qu'aux autres. Le déni était un élément capital dans cette famille. Et la petite n'échappait pas à cette règle. La sonnerie résonna dans le hall. Chacun sait ce qu'il a à faire. Jezabel épousseta une dernière fois sa robe et, s'empressa donc d'ouvrir aux invités, affublée d'un large sourire hypocrite.

Il faisait chaud cet été là. Et, comme à son habitude, Jezabel se laissait bercer par le ronron paisible des véhicules et des passants qui ne cessaient jamais de défiler. Elle aimait regarder les gens passer ainsi. Parfois, elle se surprenait à leur inventer des existences bâties de toutes pièces. Ce jour-là, elle attendait patiemment au kiosque. Devant elle, trois personnes dont l'impatience lui arrachait quelques rictus amusés. Elle ne voulait qu'un café et le journal pour larver une petite heure dans le parc d'à côté. Son regard accrocha, l'espace d'une seconde, celui d'un inconnu qui passait non loin d'elle. Le temps sembla se suspendre, comme s'il n'y avait plus qu'eux présentement. Elle inclina quelque peu la tête, intriguée, tandis qu'il ne lâchait pas cette connexion visuelle et saugrenue. Elle écarquilla les yeux lorsqu'elle comprit qu'il ne verrait pas le lampadaire sur son chemin. Elle s'agita, lui fit signe mais l'impact fut inévitable et, bientôt, le jeune homme se retrouva négligemment affalé sur le sol. Jezabel s'empressa de le rejoindre, l'air profondément inquiet. Seigneur, vous allez bien ? Elle lui tendit poliment la main afin de l'aider à se relever. J'ai essayé de vous faire signe mais... Elle gloussa doucement. Il faut regarder devant soi. Et elle rougit, comme une midinette, alors qu'elle prenait le temps de le détailler plus sérieusement maintenant qu'elle se retrouvait face à lui. Il était beau avec sa peau basanée et sa barbe de quelques jours. Elle lui offrit un franc sourire, pleins de promesses qu'ils ne comprendraient que plus tard sans doute. Jezabel, précisa-t-elle lorsqu'il fut enfin à sa hauteur. Ils n'avaient décemment rien de comparable. Elle était jonchée sur des talons, le corsage strict et le port élégant, comme le lui avait appris sa mère. Tandis que lui, avec sa guitare et son allure plus nonchalante, ressemblait davantage à un homme des rues. Il était, définitivement, le genre d'homme que sa génitrice fuirait à la hâte. Mais Jezabel n'était pas comme cette dernière, du moins, elle l'espérait. Elle jeta un rapide coup d’œil à son instrument, puis grimaça imperceptiblement. J'espère que votre guitare n'a rien. Stupide. Elle n'était pas douée pour ça. Alors elle se racla la gorge tout en pointant le kiosque derrière eux. J'allais me prendre un café... je vous en offre un ?

L'iode ruisselait le long de ses joues creusées par la douleur. Recroquevillée sur le sol, Jezabel pressait frénétiquement ses doigts contre son abdomen, comme si cela suffirait à apaiser les spasmes qui l'accablaient toujours plus. Elle voulut se redresser, mais elle ne parvenait qu'à redresser la tête pour voir, derrière ses larmes, Eros s'affairer de manière totalement désordonnée. Elle ouvrit la bouche afin de le solliciter seulement, seul un gargouillement écœurant vibra dans le creux de sa gorge. Alors, elle le contempla silencieusement, le cœur au bord des lèvres. Jusque là, leur vie n'avait été qu'un conte de fées. Ils avaient flirté, s'étaient aimés si fort que cela en avait soufflé plus d'un, puis s'étaient tout simplement dit oui devant l'autel. Ils s'étaient célébrés chaque jours, comme deux fervents croyants. Et, elle était tombée enceinte. Mais, le bonheur n'était pas éternel. Pour preuve, elle se roulait sur le carrelage de leur cuisine, dans quelques traces de sang qui lui appartenaient. C'était venu subitement, comme lorsque l'on reçoit un coup de poignard dans le dos. Ce qui lui poussait paisiblement sous le nombril c'en était allé. Et, jamais ils n'auraient la chance d'entendre les premiers cris de leur enfant. Cela arrivait. Elle était bien placée pour le savoir. Mais cela n'amoindrissait en rien la peine qu'elle éprouvait. Elle ne serait pas mère. Et Eros ne serait pas père. Ils ne seraient pas parents. Et Jezabel se haïssait ne pas pouvoir retenir cette vie qui disparaissait inexorablement. Elle se détestait d'infliger cela à Eros. Alors elle poussa un hurlement déchirant. Elle avait envie de dégueuler toute la rage qui bouillonnait présentement en elle. Mais elle n'était plus qu'un corps tourmenté qui se tordait péniblement sur le sol. Je suis désolée, je suis désolée..., répéta-t-elle difficilement. Et elle était désolée. Désolée pour cet être qui ne verrait jamais la lumière du jour, désolée pour son époux qui n'aurait pas la chance d'être parent. Désolée pour eux.

Il était tard. Jezabel pressait le pas à travers les rues bercées par l'obscurité. La brise balayait ses cheveux, s'infiltrait insidieusement sous ses vêtements. Il était tard et, elle n'avait qu'une idée en tête: rejoindre Eros. Sa carrière de chirurgien ne lui offrait que très peu de temps libre. Alors, c'était toujours une joie de retrouver le réconfort de sa demeure, ainsi que son époux. Elle jeta un énième coup d’œil à sa montre. Il dormirait probablement lorsqu'elle retrouverait la chaleur de son foyer. Mais, peu lui importait. Elle voulait simplement s'allonger à ses côtés, se blottir contre lui et oublier l'affreuse journée qu'elle venait de passer. L'une de ses patientes s'était évanouie pour l'éternité entre ses mains impuissantes aujourd'hui. Et, même si on lui avait appris à prendre du recul, Jezabel ne parvenait pas encore à passer au dessus de ces pertes déplorables. Le ciel gronda au dessus de sa petite tête endolorie. Puis, rapidement, la pluie déversa sa tristesse. Elle grommela entre ses lippes pincées. Si, souvent, elle appréciait le calme de la ville la nuit, ce soir, elle n'avait pas envie de s'éterniser. Elle bifurqua au coin d'une intersection, s'engouffra dans une allée que trop peu éclairée. Une plainte résonna quelques mètres plus loin. Ses sourcils se froncèrent et, elle sentit son myocarde se cabrer dans sa cage-thoracique. Elle ralentit prudemment la cadence de son pas, juste à temps pour apercevoir une silhouette massive se pencher au dessus d'une carcasse lamentablement éparpillée sur l'asphalte. Seigneur... Elle s'immobilisa promptement, sans parvenir à s'arracher de cette scène horrifique. Elle connaissait brièvement le monde occulte qui l'entourait, notamment grâce à Eros qui lui avait révélé l'énorme pouvoir qui ruisselait dans ses veines. Mais, elle n'était pas préparée à cela. Elle recula, lentement d'abord, puis se fit violence pour accélérer la danse. Un bruissement d'ailes lui fit regarder en arrière une dernière fois. Il ne restait plus que ce pauvre pantin désarticulé dont le sang s'épanchait timidement autour de lui. La Créature avait disparu. Jezabel hésita quelques secondes. Devait-elle porter secours à cet inconnu, ou tout simplement fuir en feignant de ne pas avoir assisté à tout ceci ? Mais son incertitude se fit trop longue et, lorsqu'elle se décida enfin à rebrousser chemin, ce fut face à deux égides fièrement dressées qu'elle se retrouva. Ses traits se décomposèrent en une expression profondément horrifiée. Elle secoua mollement sa petite caboche, le souffle erratique et le corps tendu à son paroxysme. Pitié, je... Mais la Bête laissa reluire sa dentition acérée. Elle libéra un hurlement de terreur, prête à prendre ses jambes à son cou, seulement la bourrasque qu'elle prit au visage la fit choir lourdement sur le bitume. Elle tenta de se débattre lorsque son assaillant se replia sur elle, elle essaya vainement de repousser ses ardeurs, mais la prise sur sa gorge fit disjoncter jusqu'à la moindre particule de raison. Les crocs s'enfoncèrent dans son épiderme dans une avidité despotique. Quelques larmes perlèrent au coin de ses cils, alors que son existence lui échappait goulûment, dans de grandes aspirations. Le visage d'Eros se découpa timidement dans ses songes puis, le noir la submergea enfin.

Eros... Eros, j'ai faim... Jezabel s'approcha de son époux, le pas mal assurant et les mains tremblantes. Quelques larmes désolées perlaient le long de ses joues, venant contraster le regard avide qu'elle lui offrait. Elle enroula ses bras autour de lui, posant son front contre le sien dans un souffle rauque, dépendant. Elle avait besoin de lui plus que quiconque. Elle avait besoin de son sang et de toute la tendresse qu'il s'évertuait à lui offrir malgré ses méfaits. Elle avait besoin de lui. Sa paume se déposa contre sa pommette, alors qu'elle s'excusait d'un regard peiné. Elle ne voulait pas lui infliger cela. Mais elle n'avait pas le choix. Elle ne parvenait pas à maîtriser cette faim dévastatrice qui lui prenait les tripes quelques fois. Elle secoua doucement la tête, laissant sa mâchoire se désarticulée en une gueule despotique. Pardonne-moi... Et elle enfonça ses crocs dans la chair tendre de sa gorge. Elle avala de longues lampées d'hémoglobine, tout en caressant ses cheveux pour se faire pardonner.

Désormais, leur existence n'avait plus rien de ce conte d'antan. Désormais, leur vie n'avait plus rien de beau.