Elle allait la tuer ! La tuer la tuer la tuer ! Lui rentrer dans le lard, l’éviscérer, la pendre, lui tirer les cheveux même, lui donner un coup de pied… et après lui faire un câlin. L’ordre des priorités, ce n’était pas son truc à Willow. Mais la seule chose dont elle avait vraiment conscience, c’était qu’Anthéa allait se prendre une mandale… enfin, presque. Bon pour être honnête, Anthéa n’allait rien se prendre du tout, à part une petite bourrasque d’inquiétude et la bouffée de colère qui entravait le souffle de Willow depuis quelques jours. Certes, la petite dernières des Deslauriers n’était pas du genre à s’angoisser rapidement, mais le silence pesant venant de sa sœur glaciaire ses derniers temps n’avait rien de rassurant. Elle l’ignorait, voilà tout. Du moins c’était l’impression qu’elle donnait. Et bordel pour une fois Willow n’avait absolument rien fait pour mériter un tel traitement ! Au contraire la dernière fois qu’elles s’étaient vues, elle lui avait apporté des gâteaux fait maison. Des gâteaux parfaitement immondes, mais merde quand même ne disait-on pas que s’était l’intention qui comptait ? Bah ouais genre, Willow, en tenue de chez John Galliano, un fouet à la main en train de checker une recette sur Marmiton… la grosse blague quoi. Et pourtant, cela avait été le cas et Anthéa avait dégusté les petites horreurs avec gentillesse… enfin un peu. Mais elle en avait mangé. Et le lendemain, silence radio. Oh putain … Le lien se faisait dans l’esprit tordu de la jeune Alchimiste. Anthéa + manger gâteaux dégueu = … empoisonnement ?

« Oh putain j’ai buté ma sœur… »

Bon non, pas de panique. Willow passait mentalement l’ensemble des ingrédients utilisés. Et en l’absence de Mort aux rats ou de Mercure,  il y avait peu de chance qu’Anthéa soit actuellement crevée dans ses propres secrétions quelque part dans une ruelle. On se calme… Oreste saurait lui en dire plus ! Après un rapide coup de fil au frangin crétin (qui devait encore papoter gaiement avec Sheriff Octet ou l’autre con de TV parlante puisqu’il avait foutu à peu près cent ans à répondre), elle fut rassurée, en un sens. Anthéa allait bien, et lui avait donné des nouvelles très récemment. Genre le matin. Genre… GENRE ! Mais putain, Anthéa la FILTRAIT ! Mais dans quel monde vivait-on si les grandes sœurs filtraient les Willow nom d’une capote !?

Voila ce qui avait donc amené Willow à vouloir tuer Anthéa, et à se pointer directement au travail de cette dernière alors qu’il n’était pas encore 9H30. En sortant de sa voiture avec chauffeur, la jeune femme remit en place sa robe relativement courte pour la saison, sa seconde main tenant un moka épicé de Noël. Parce qu’elle avait beau être en pétard, la gourmandise primait quand même … Bon signe. Willow termina son breuvage, avant de le laisser tomber par terre où se précipita le chauffeur qui croyait vraiment que ramasser les ordures de sa boss lui rapporterait de la tune en plus à la fin de l’année. Puis, chaussée de ses bottes en caoutchouc jaune (pas swag ok… mais vu le temps de merde Canadien, faut prendre ses précautions !) Willow retira ses lunettes de soleil qui ne servait définitivement à rien pour partir à l’assaut du musée. En vitesse, elle se dirigea vers l’accueil pour causer à un vigil qui la supplantait d’au moins trois têtes et une demi-main.

« Dit-moi mon brave, serait-il possible que tu m’appelle  Anthéa Deslauriers ? C’est ma frangine, et elle tente de m’ignorer comme une bonne grosse moche complexée par ma beauté éclatante. Comment ??! Comment ça j’ai pas de badge ‘visitor’, et je peux pas passer sans badge ‘visitor’ ? Je vais te badget ta gueule en deux mon pote si tu me fais pas passer dans la zone que je veux, OK ? JE VISITOR CE QUE JE VEUX MOI ! »

Bon bah voilà… on hypnotise le gorille, et on passe. Mais très contrarié cette fois, Willow ne déboula pas avec la douceur dont elle souhaitait faire preuve au départ. De bonne volonté d’accord, mais volonté de merde. Par conséquence, une fois Anthéa localisé, la jeune Deslauriers n’y alla pas vraiment de mains morte, lui tapotant d’abord sur l’épaule pour capter son attention, mais ne lui laissant pas une seconde pour lancer avec une irritation affichée :

« Je suis vraiment très désappointée Anthéa… franchement, c’est quoi le délire ? Pourquoi tu ne prends pas mes appels ? Pourquoi tu ne réponds pas à mes SMS ? Même la vidéo du chat qui lâche une caisse, ça ne t’a pas fait réagir ! »

L’air soudainement peiné, elle fit une légère pause mais reprit un ton au-dessus dès qu’Anthéa sembla prendre son souffle pour lui répondre :

« NON ! Me ment pas, tu as parlé avec Oreste ce matin même donc je sais que c’est moi que tu ignores putain ! J’ai fait quoi encore ? »
 

Cela faisait quelques jours à présent que la colère s'était immiscé dans mon quotidien. Un rien m'énervais et la perte de contrôle de mes pouvoirs me faisaient passer pour Elsa, la reine des neiges, version deux. Génial hein ? Fait chier. Comment avais-je put être stupide à ce point là ? Pour une fois que je tombais amoureuse d'un homme, il fallait qu'il soit l'ex mari de ma propre sœur. Les boules. Pour la première fois en dix-sept ans je m'étais laissé aller. Une fois de plus Willow, indirectement, m'avait coupé l'herbe sous le pied.
Attention, je ne regrettais pas d'avoir Flynn, et jamais je ne regretterais d'avoir prit soin de l'enfant que je considérais comme mon fils. Je n'avais cependant pas eu le choix, j'avais accepté au début pour quelques semaines et ce fut des années au final. Rapidement, j'avais du gérer mes études, trouver un travail et élever le petit garçon. Petit garçon devenu un jeune homme dont j'étais fier. Je n'avais plus eut le temps pour faire dans le relationnel à côté. Donc les hommes, les amis, tout ça, ça avait été fini pour moi. Encore à l'heure actuelle ma routine était morne et ennuyeuse : Je me levais, préparais le ptit dej et les affaires de Flynn avant d'aller taffer et de rentrer au soir pour être présente avec lui. Et dire que j'avais sacrifier quelques moments avec lui pour un blaireau qui était sortit avec ma soeur et pire encore, qui gardait sa photo dans son portefeuille. Allez, mange toi ça ma grande. Juste bonne a être mère, ramasser les dégâts de Willow et point barre.

Pour l'heure, je ne voulais juste plus entendre parler de ma soeur, si j'aurais pu, je l'aurais effacer de ma mémoire. Pour le moment, je me contentais juste de filtrer ses appels et SMS, refusant de lui parler. Que ce soit a elle ou à l'autre con. Ma patience avait trop été mise à rude épreuve. J'étais à bout, vidée. Un rien pouvait me faire exploser. Ce qui serait, vous en conviendrez, dommage.
Bossant dans mon bureau au calme, une douce musique sereine en fond pour que je puisse rester Zen, je ne vis pas l'ouragan Willow arriver derrière moi. Et oui, quand on a une vie de merde, parfois, se plonger a corps perdu dans le taff faisait du bien. Même si une bonne grosse bouteille de pinard de supermarché dégueu me ferait le plus grand bien. Je devrais bien m'enjailler un jour de la sorte pour ne pas pleurer de rage et de désespoirs. Bon j'exagère un peu, soit.

Une tape sur mon épaule se fit sentir, je n'avais même pas besoin de me retourner pour savoir de qui il s'agissait. Mon corps se tendait à la seconde, mais je me contentais de lui faire face, la laissant déblatérer ses conneries sans queue ni tête. J'étais lasse, la regardant comme si il s'agissait d'une vieille folle échappée de l'asile. J'attendais patiemment et de façon tout à fait neutre qu'elle ferme enfin sa grande gueule pour parler.
Quand je pris mon souffle pour répondre, elle m'interrompit de nouveau, comme si c'était mon genre de chercher des excuses et de mentir. Elle était sérieusement en train de me taper sur les nerfs et cela se ressentait car dans la pièce, la température chuta de quelques degrés. Je me contrôlais comme je pouvais...

« Comme ça tu sais ce que ça fait Willow.  Je t'ignore que quelques jours et tu viens faire la mijorée ? Allons ma grande, que devrais-je dire pour les quinze ans dont tu as brillée par ton absence ? »

Je me calais au fond de ma chaise, les jambes croisé. La douce Anthéa n'était plus la depuis un moment, mais cette fois-ci c'était la reine des glaces qui avait prit le dessus.

«Et pourquoi je filtrerais tes appels ? Ah si, ça me semble logique. Car je ne veux pas te parler en ce moment. Alors remballe ton numéro de sœur outrée et laisse moi travailler. On en reparlera plus tard si l'envie m'en prend un de ces jours. Bonne journée. »

Sans lui laisser le temps de répondre, je lui tournais à nouveau le dos afin de reprendre mon travaille. Qu'elle aille se faire foutre un petit peu, ça lui ferait du bien que quelqu'un l'ignore une fois de temps en temps, mademoiselle la princesse.
 

Si Willow n’avait pas immédiatement ressentit le froid qui s’était abattu sur la pièce, celui qui s’exprimait sur le visage de sa grande sœur en revanche, ne pouvait pas vraiment passer inaperçu.  Pendant quelques secondes, la jeune femme hésita. Elle observa sa sœur avec un mélange d’anxiété et d’impatience, imaginant déjà que quelque chose de grave ou du moins, de pénible était arrivée à Anthéa. Mais rapidement, cette dernière s’exprima, et ce fut une véritable gifle qui percuta Willow. Un impact violent, et froid, qui la laissa parfaitement stupéfaite. Anthéa n’avait pas le même regard, pas la même attitude et sans doute, remarquer cela avant de parler aurait été une bonne chose histoire d’éviter ce qu’il venait de se passer. Gratuitement, Anthéa ressortait les dossiers. Et notamment celui de son absence. « Comme ça tu sais ce que ça fait Willow.  Je t'ignore que quelques jours et tu viens faire la mijorée ? Allons ma grande, que devrais-je dire pour les quinze ans dont tu as brillée par ton absence ? » A son tour, Willow se redressa. Non seulement sa grande sœur venait d’être mesquine et blessante, mais en plus, elle n’avait aucune raison de le faire. Aucune… Depuis deux ans Willow s’efforçait de reconstruire leur relation. Elle avait fait preuve de patience afin qu’Anthéa et Oreste lui pardonnent et acceptent de repartir sur des bases qui jusque-là, semblaient solides et affectueuses malgré les différends. Malgré la blessure qu’elle avait infligée à chacun d’entre eux par cette absence qu’elle regrettait aujourd’hui. Mais cette attaque-là, était odieuse… et en un sens, impardonnable.  

Cependant, Willow resta silencieuse. Elle se contenta de soupirer de dépit, fixant sa sœur qui décidément, avait l’air très en colère… mais pourquoi ? Qu’avait-elle fait putain ? Depuis son retour à Ottawa, Anthéa avait eu des dizaines de fois l’occasion de lui reprocher cela. Alors qu’en cet instant, c’était juste violent, et cela n’avait pas de sens. Cette absence, Willow la regrettait chaque jour. Le mal qu’elle avait fait à son frère, à sa sœur et par conséquence aussi à Flynn la hantait depuis longtemps. A chaque fois qu’elle les voyait sa conscience se faisait difficile à supporter. Mais finalement, aucun des Deslauriers, pas même Anthéa n’avait jamais demandé pourquoi… Quelle était la raison de sa fuite… personne ne s’intéressait à cela, et maintenant on lui renvoyait ça dans la face sans aucune raison ? Non… c’était trop facile. La colère montait aussi de son côté, et plus encore après la seconde réplique qui ne tarda pas à jaillir. «Et pourquoi je filtrerais tes appels ? Ah si, ça me semble logique. Car je ne veux pas te parler en ce moment. Alors remballe ton numéro de sœur outrée et laisse moi travailler. On en reparlera plus tard si l'envie m'en prend un de ces jours. Bonne journée. » Loin d’être intimidée, Willow se pencha au contraire sur le bureau en y appuyant ses mains, avec lenteur et insolence pour adresser un sourire relativement hypocrite à Anthéa. Elle avait mal, elle était blessée, à vif… devant une situation inédite dont elle ne comprenait pas la source, dont elle n’était pas responsable bien qu’étant directement incriminée.

« Tu aurais pu me briser le cœur Anthéa, mais d’après ce que tu penses de moi, je n’en ai pas… Une chance. Bouuuh la vilaine Willow, qui tombe à pic pour faire ses nerfs dessus ! Heureusement, je suis au moins utile à cela. Bien, maintenant que tu as bien vidé ton petit sac de merde… laisse-moi m’excuser. Car oui, j’étais inquiète pour toi. Mais on ne m’y reprendra plus, c’est certain ! Il vaudrait mieux que je reste conne et égoïste, sinon tu n’aurais plus grand-chose à me reprocher, se serait con non ? »

Oula, non… pour ne plus l’y reprendre, ça. Son expression changea alors. De parfaitement fourbe, à la limite de l’insolence, elle devient bien plus dépitée, malheureuse. C’était sa sœur qui venait de la dévaloriser de la sorte, et Willow ne pouvait alors pas se sentir plus rabaisser qu’en cet instant. Même sa mère autrefois n’avait pas réussi à lui faire ressentir à quel point elle était une merde… Anthéa venait d’y parvenir, chapeau bas. Mais loin de s’accabler sur son sort, l’Alchimiste préférait de loin attaquer. Et sous le coup de la colère et de l’amertume, la riposte serait peut être sévère malgré la tendance qu’avait Willow à laisser passer beaucoup de choses quand il s’agissait de sa famille. Elle laissa échapper un petit rire jaune, faisant quelques pas en arrière pour indiquer qu’elle quittait la pièce comme Anthéa le souhaitait… C’est donc froidement qu’elle se tourna quand même vers elle, pour à son tour, mettre les points sur les i :

« Mais note, chère sœur que je ne suis pas venue faire mon numéro de mijaurée, mais que toi par contre, tu es en train de nous faire une démonstration de pétasserie absolument fabuleux. Mais ça ne te va pas… alors tu vas gentiment prendre ton comportement de vieille fille mal baisée et te faire foutre avec, ok ? Parce qu’elle est bien raide et bien grosse ton attitude de merde… Ça te soulagera quelque peu… sans doute… et si ce n’est pas le cas bah tant pis pour ta gueule. »