Histoire
« I don’t care how poor a man is; if he has family, he’s rich. »
Les trains démarrent souvent au moment où on s’y attend le moins. ~ 7 ans.Alors que la famille Williams vivait confortablement dans un petit appartement, deux enfants à la charge, leur père disparut. Du jour au lendemain, sans laisser de traces sur son passage. Leur demeure demeurait vidée de toute preuve pouvant témoigner de la vie qu’avait ici mené Matthew Williams. Toutes ses affaires avaient disparu au petit matin, quand Sloan trouva, pour la première et dernière fois, sa mère en pleurs. Il avait sept ans.
- Maman ? Pourquoi t’as des larmes ?La jeune bibliothécaire releva la tête, les yeux rougis et la voix enrouée par les sanglots.
- Tout va bien mon garçon. Même s’il n’en avait bien évidemment pas cru un mot, le petit n’avait pas insisté, trainant les pieds jusqu’à l’étage. Il avait trouvé sa grande sœur, lui avait fait part de la situation, et avait attendu qu’elle lui explique. Mais la jolie Noah, alors âgée de dix ans, n’était au courant de rien. Semblant tout de même avoir compris, elle prit doucement son cadet dans ses bras, passant une main rassurante dans ses boucles.
- A partir de maintenant, il faudra aider maman. D’accord Sloan ? Encore tout chamboulé, il s’était contenté d’acquiescer, se réfugiant à nouveau dans l’étreinte chaleureuse de sa sœur. Il n’avait pas encore réalisé l’ampleur des paroles de la blondinette.
Depuis ce jour, aucun membre de leur petite famille n’a plus jamais abordé le sujet du père disparu. Était-il simplement parti commencer une nouvelle vie ? Avait-il été enlevé, tué ? Personne ne savait. Ou bien, personne ne voulait lui dire.
Quoi qu’il en soit, il y avait bien une chose dont le gamin était certain, quelques mois plus tard ; il détestait cet homme qui les avait abandonnés, quelle qu’en soit la raison.
***
~ 14 ans.Quand on n’a pas d’argent, il faut bien en trouver. Surtout quand la mère de famille a arrêté de travailler pour se consacrer à ses enfants –ou plutôt sa fille, étant donné que le garçon n’est qu’un bon à rien– et que l’aînée est studieuse et destinée à de grandes études. Alors, qui est-ce qui doit se résigner à renflouer les caisses ? On se le demande tiens…
Quand on n’a pas de père, il devient difficile de trouver les bons repères. On erre, se cherche, trébuche, se relève, échoue… En quête de son identité, sans autorité paternelle pour nous remettre sur le droit chemin. C’est en partie parce que personne n’était présent pour un hyperactif en manque d’attention que Sloan fit ses premières erreurs de fréquentation. Avec une petite bande d’amis, ils faisaient les quatre-cent coups, défiant les lois et l’ordre établi au lycée. Après tout, il était considéré comme élève médiocre et insolent, alors pourquoi se priver de s’amuser ?
Les enseignants le considéraient comme un cas désespéré depuis trop longtemps. Ils ne faisaient plus attention à lui, ne prenaient pas la peine de se renseigner sur son état familial. Et lui, il buvait, fumait, traînait dans les rues jusqu’à pas d’heures. Un coin reculé de son cerveau l’incitait à arrêter ses conneries, à prouver aux autres qu’il n’était pas un moins que rien. Mais quand on ne reçoit aucun soutien, pourquoi s’embêter à remonter la pente ? Tout était tellement plus simple quand on menait une vie de délinquant…
Sa sœur fut la seule à réagir, comprenant que l’adolescent qu’était son frère avait de sérieux ennuis. Son comportement était plus que douteux, sa tête faisait peur, ses amis étaient louches… trop louches. Inquiète, elle tenta plusieurs fois de le raisonner, lui expliquant qu’il était un garçon gentil, attentionné… Ces mièvreries ne firent qu’empirer les choses. Sloan l’envoya bouler sans scrupules. Elle passait son temps à étudier, ne lui accordant que peu de temps. Pourquoi devrait-il l’écouter après tout ? Elle ne le connaissait même pas ; il n’était pas le parfait gamin qu’elle pensait. Il était irrespectueux, en colère, déçu du monde et rebelle. Il traficotait dans des magouilles qu’il ne comprenait même pas, mais peu lui importait ; au moins, il faisait quelque chose qu’il était capable d’assurer. Du moins, c’était ce qu’il croyait en basculant du côté obscur de la Force…
***
~15 ans.- Tu poses pas de questions, tocard. Le chef veut qu’tu livres c’colis à l’autre bout de la ville, à l’entrepôt. Si tu foires, on te flingue. Docile, pour une fois, Sloan hoche la tête, glissant le paquet dans son sac à dos. Le gars face à lui est géant, bourru et inquiétant. N’ayant strictement aucune envie de se faire descendre, il n’oppose pas de résistance, et prend la direction indiquée. Si c’est le chef qui l’ordonne, alors il fera le boulot. La bande a besoin de lui pour remplir cette mission –du moins, c’est ce qu’il ose espérer– et il ne doit pas échouer. De toute manière, il n’y a quasiment aucun risque ; on ne peut pas vraiment revendiquer les compétences franchement discutables des autorités de la ville. Les petits rebelles qu’ils sont ont déjà racketté plusieurs personnes sans qu’un flic n’ait levé le petit doigt. Et après ça se dit diplômé…
Les mains dans les poches, le garçon marche tranquillement dans les rues. Son pas nonchalant foule le pavé dans un bruissement discret. Une soudaine envie de siffloter le prend, mais il se retient à temps. Si personne ne le remarque, inutile d’attirer volontairement l’attention.
Alors que l’entrepôt se rapproche, Sloan percute une forme massive au coin d’une ruelle. Sans doute soupçonneux à l’idée de trouver un gamin dans ce lieu peu rassurant, et en pleine nuit, le policier le retient. Impossible de détaler, la carrure du mec est trop impressionnante et lui bloque complètement le passage. Soufflant d’agacement, il se récolte une bonne tape sur l’épaule alors que le soi-disant représentant de la loi lui ordonne de lui donner son sac. En bon gamin désobéissant à souhait, Sloan refuse purement, et simplement.
- Tu me donnes ton sac garçon, ou bien je t’emmène au poste. - Sauf votre respect, j’n’ai aucune raison d’vous filer mon sac, M’sieur.Sans doute les flics n’aiment pas les moqueries. Dix minutes plus tard, l’homme débarque au commissariat en soulevant presque le gosse à bout de bras. Un adolescent de quinze ans à peine, frêle et étonnamment fier. Le sac serré dans ses bras, il refuse de parler ou de donner son bien aux autres policiers, même aux plus aimables. N’y tenant plus, la brute de service finit par lui arracher des mains sans préambules, déchirant la fermeture en l’ouvrant. Un kilo de cocaïne à l’intérieur. Totalement pris au dépourvu –bien qu’il n’en montre rien– Sloan reste muet comme une tombe, essuyant tous les coups d’éclats des moins patients sans ciller. Finalement, la sentence est donnée ; un aller simple au centre de détention pour mineurs. Nous vous souhaitons un agréable séjour.
***
Un jour, un homme lui rend visite. Depuis des mois qu’il se trouve enfermé dans ce centre, il en a vu passer, des gens. Entre ceux qui le traitent comme un prisonnier (comment ça c’est ce qu’il est ?), ceux qui viennent l’assommer de leurs paroles pleines de niaiseries en tout genre –lui disant que, soi-disant, ils le comprenaient– et les autres qui tentent par tous les moyens de le raisonner… Il en a vu des vertes et des pas mures. Et tout cela ne fait que renforcer sa rancœur, son désir de rébellion. Jusqu’à cette rencontre pour le moins particulière. L’inconnu dit s’appeler Selen. Il n’a pas l’air particulièrement aimable, ni intéressant. Connaissant déjà le discours qu’on va lui servir sur un plateau d’acier, Sloan prépare sa première réplique. Sauf que l’étranger ne parait pas le moins du monde outré. Étonnement, il poursuit sa tirade, lui racontant ses propres antécédents. Et sans comprendre pourquoi, le jeune homme l’écoute attentivement, repérant cette spontanéité qui l’intrigue. La franchise avec laquelle il lui parle l’ébranle, le rassure presque. Il en est de même les autres jours. Plus ils apprennent à se connaitre, plus Sloan change. Il n’abandonne pas son comportement exécrable avec les autres visiteurs, mais son attitude envers Selen s’adoucit. Avec lui, il redevient un gamin quémandant l’attention d’un père qu’il n’a jamais eu. Par leurs discussions, il tente de se livrer à l’homme, de lui décrire sa condition familiale et financière, encouragé par le bénévole. C’est ainsi qu’un lien puissant s’installe entre eux. Le genre de confiance que le brun n’a jamais donné à qui que ce soit.
C’est grâce à cet inconnu qui ne l’est plus que le gamin finit par tout avouer, dénonçant la bande pour qui il livrait, et, par la même occasion, ses amis qui l’ont abandonné comme une simple merde. Finalement disculpé, Sloan sort enfin de cette étouffante prison.
***
~16 ans.Pendant quelques jours, la vie reprend presque normalement. Sloan ne retourne pas au lycée, forçant sa famille à piocher dans les dernières économies en attendant qu’une des femmes ne trouve une solution. Encore perturbé par son récent séjour au centre, il se contente de se promener, de-ci de-là, s’appuyant de temps en temps à un mur pour empêcher ses poings de frapper quelqu’un. Ce serait une mauvaise idée. Soit il choisirait mal et la personne le mettrait au sol en cinq secondes, soit il s’en prendrait à trop faible et risquerait de nouveaux ennuis. Alors qu’il se remet tranquillement à marcher, il se rend compte qu’il fait nuit noire. Comment a-t-il pu se balader si longtemps ? C’en est presque surréaliste.
- Fait chier, j’sais même pas où j’suis…A peine a-t-il terminé sa phrase qu’un bras sort de nul-part pour vivement l’entrainer au coin d’une ruelle sombre. Par instinct, Sloan glapit de surprise, avant de commencer à hurler. Une main puissante s’abat sur sa bouche pour le faire taire, des bras encerclent son ventre pour le maintenir immobile. Des lèvres s’approchent de son oreille et crachent ;
- Tu vas payer pour ce que tu as fais, enfoiré. Tu nous as dénoncés, je vais te tuer !Avec un frisson d’horreur, le jeune homme comprend à qui il a à faire ; le chef de la bande qui l’avait autrefois recruté. Il aurait dû se montrer plus prudent. Il aurait dû se douter que cet homme souhaiterait se venger. Dans un ultime soubresaut d’espoir, il se met à gesticuler et tenter de faucher son adversaire. Celui-ci lui assène un coup dans la mâchoire, un autre sur le nez, puis un dernier coup de genou dans la jambe. Sloan sent les larmes lui monter aux yeux alors qu’on le bâillonne solidement avant de le jeter violemment dans le coffre d’une voiture. Le sang coule de son nez jusqu’à sa mâchoire horriblement douloureuse. La tête du garçon bascule en arrière et ses paupières se ferment dans un même mouvement.
Quand il se réveille –quelques minutes, une heure plus tard… ?– le ciel est toujours d’un noir d’encre. Ses yeux se plissent sous la vive lumière que projette le faisceau d’une lampe face à lui. Quand sa vision s’accommode, il remarque la silhouette familière qui se cache derrière la lampe torche. La même qui l’a foutu dans cette caisse. Et maintenant, la haute cime des arbres lui indique qu’il se trouve en pleine forêt, à genoux au beau milieu d’une petite clairière. Il est toujours bâillonné, mais pas attaché. Néanmoins, Sloan n’esquisse pas un geste pour fuir. Il n’y arriverait même pas. Lorsque le chef pose la source de lumière, le jeune homme peut aisément voir le sourire mauvais sur ses lèvres. Il déglutit difficilement en constatant qu’un flingue scintille à la lueur de la lune. Sa salive a le goût de sang. Il va mourir pour avoir dit la vérité. Il le savait depuis le début, que celle-ci n’amenait que des ennuis.
Tout tremblant, il ferme les yeux, scellant ses paupières pour ne pas regarder la mort en face. Il est lâche, mais n’en a strictement rien à foutre. Une balle dans la tête. Il n’aura pas le temps d’avoir mal. Il ne sentira rien, son cerveau explosera sans douleur. Ou bien, juste un violent flash avant de sombrer dans les méandres de l’oubli. Il n’a fait que des conneries, voilà la vengeance qu’il subit.
Un hurlement provoque un vif sursaut et Sloan ouvre les yeux. Sa respiration se coupe brusquement en voyant ce qui a incité le criminel à s’enfuir, laissant l’arme sur le sol. Une créature qui aurait seulement pu exister dans son imagination d’enfant. Une sorte de… dragon peut-être ? Persuadé qu’il hallucine purement et simplement –sûrement l’effet d’une mort imminente– le gosse reste parfaitement immobile, émerveillé par son hallucination.
Soudainement, le monstre disparait, laissant place à une personne de grande taille qu’il reconnait immédiatement…
- S-Selen ? murmure-t-il faiblement, ayant du mal à trouver de quoi se rattacher à la réalité.
Une fois de plus, c’est cet homme qui l’a sauvé. Cette fois-ci, sous une forme pour le moins… étrange, certes. Mais il l’a tout de même fait. Le sauveur s’approche de Sloan et l’aide à se relever. Ce dernier chancelle, masse sa tempe en gémissant, et s’effondre à nouveau, dans les bras du précédent dragon.
***
~ 20 ans.Depuis cette nuit, il y a désormais quatre ans, où le jeune homme a vu sa vie défiler devant ses yeux, ils ne se sont plus séparés. Refusant toujours catégoriquement de suivre un quelconque cursus, il a été embauché par Selen en tant qu’apprenti tatoueur. Plus enjoué qu’il ne l’a jamais été, il n'a pas eu à réfléchir deux fois avant d'accepter. Il n’a pas l’intention de laisser son patron un jour. Toujours –ou presque– fourré dans ses pattes, il passe son temps à apprendre ce métier qui lui tient à cœur et à écouter ses histoires surnaturelles. Inutile de le nier, Sloan est complètement fasciné par cet homme qui a peu à peu pris la place d’un père dans sa vie. Ils se disputent relativement régulièrement, se contredisent, mais le garçon revient toujours vers son sauveur, docilement. Et pourtant, Dieu sait qu’il déteste obéir à quelqu’un ! Mais il fait des efforts pour calmer son tempérament de jeune insupportable. Pour Selen. Parce qu’il est certainement la personne qui l’a le plus aidé, en dehors des tentatives infructueuses de sa sœur.
A présent, la vie de Sloan se fait relativement plus calme ; il a un salaire lui permettant de faire tourner la maison, un patron qui le protège et l’instruit –bien qu’il soit de plus en plus inquiet à propos du grand nombre de créatures vivant autour de lui–, et… un chien. Fly, un berger allemand qu’il a trouvé seul dans un parc, de nuit, deux ans après l’agression. L’animal était recroquevillé sur lui-même et mort de froid. Après de dures tentatives d’approche, Sloan a finalement réussi à gagner sa confiance et l’emmener chez lui pour en prendre soin. Il était affamé, mais en bonne santé. Bien que craintif au départ, il a fini par s’attacher au jeune homme, et réciproquement. Depuis deux années maintenant, les deux compagnons passent leurs journées ensemble, le garçon aimant particulièrement voir son chien courir sur l’herbe marquant leur rencontre. Quand Sloan est au travail, Fly occupe fidèlement leur appartement pour veiller sur les filles.
Tout doucement, celui qui a fait maintes et maintes conneries poursuit sa vie.
Après tout, un train peut en cacher un autre…Leïa alias L'poney blondYop les amis ! J'ai pas grand chose à vous dire sur moi, si ce n'est que je passe mon temps sur les forums. Avec la quantité de travail qui augmente doucement mais sûrement, je devrai être un peu plus occupée par la suite, mais je reste relativement régulière dans mes posts, du moment que je n'ai pas trop de RPs en cours. Sinon, j'vous aime déjà !